Dillon et ses nouveautés 2019


Dillon.
Dillon, Dillon, Dillon… Que dire des rhums Dillon ?

Dillon (qui est distillé chez Depaz) est sans doute la marque de rhum de Martinique qui souffre de la plus mauvaise image en métropole. Mais pourquoi et est-ce justifié ?
Des produits disponibles en grande distribution, des petits prix, des rhums blancs réputés mauvais… La liste est longue. Concernant la qualité les rhums blancs, je ne saurais me prononcer, puisque je n’ai jamais dégusté leur gamme basique ; d’autant que Dillon est une de ces marques de rhum agricole dont la production destinée à la métropole est mise en bouteille dans l’hexagone, ce qui n’est jamais synonyme de qualité gustative (réduction faite trop rapidement, temps de repos très court). En revanche, en Martinique ils doivent être très différents comme en témoigne la récente médaille pour le blanc 55 lors d’un concours organisé sur l’île. Cela expliquerait aussi ce qui s’y dit “Dillon y bon” – oui mais uniquement sur place alors ?
J’ai par ailleurs goûté des blancs de chez Dillon, les “premiums”, avec le Farandole, le Ti Flè Blé et le Canne Rouge. Les trois sont bons, dans des styles différents. Mais sont-ils embouteillés sur place, contrairement aux basiques disponibles sur les rayonnages de nos grandes surfaces métropolitaines ? J’imagine que oui.

distillerie-dillon

Distillerie Dillon à Fort-de-France – là où se fait la mise en bouteille et où se trouvent les chais. La distillation, elle, se fait chez Depaz (crédit photo : Rumporter)

Et les vieux alors ? Là encore des petits prix même sur des rhums XO de 7 ans, voire plus. Personnellement je trouve leur VSOP plus que respectable (je l’ai encore goûté à l’aveugle il n’y a pas si longtemps que ça), pour un prix imbattable. Et comme je le disais, leur 7 ans, leur 10 ans (le Grenadier) et leur 12 ans se défendent tous bien, indépendamment de leur prix ; mais quand on sait par exemple que le 12 ans est à moins 45€, il n’y a plus lieu d’avoir débat.

Alors oui, une bonne partie de leurs rhums se trouve en grande surface (est-ce nécessairement un mal ?), oui ils pratiquent de petits prix (je ne crois pas que l’on puisse retenir ça contre eux) et leur blanc basique n’est, a priori, pas bon (du fait de son embouteillage en métropole, comme pas mal d’autres). Pour le reste, la qualité est régulièrement au rendez-vous. Le problème c’est donc l’image, cette image de produits de mauvaise qualité. Comment faire pour combattre cette sale réputation ? En sortant des produits haut de gamme ? C’est peut-être une piste, c’est en tout cas celle que Dillon semble vouloir suivre en cette fin d’année 2019. Vous vous en doutez, ces nouveautés risquent d’être à des prix sensiblement plus élevés que ce que l’on connait de la marque ; mais il serait compliqué de le leur reprocher, particulièrement quand leurs prix bas sont parfois source de critique (ce qui est étrange, si vous voulez mon avis).

IMG_4436

Excellence Rhum, la boutique

Et là, on n’est pas mal puisque la boutique Excellence Rhum, dans le 6ème arrondissement de Paris, proposait justement, il n’y a pas longtemps, une dégustation des quatre nouveaux rhums signés Dillon, avec au programme trois vieux et un blanc : un millésime 2004 (déjà rapidement dégusté au week-end 2.0), deux single casks 2003 et un brut de colonne.

Bref, allons-y, jetons un œil – et une narine – à ces sorties prochaines.
Je vous retranscris mes notes prises sur le moment pour vous livrer mes impressions le plus fidèlement possible, à chaud.

Dillon Millésime 2004

IMG_5150

Dillon Millésime 2004 – 43%

Nez très frais et sucré, agrumes (mandarines) gorgés de soleil, passage pomme, finesse, boisé fin et légèrement poudré, léger tabac, légers fruits à coque. Agrumes dominent et les autres éléments complètent par petites touches.

Bouche où le bois se sent un peu plus mais on reste sur les agrumes en dominante. Vanille en toute fin de bouche. Alcool pourrait être un peu plus fort mais on reste dans la finesse.

Finale où c’est un tout petit peu tannique, une poudre boisée reste en bouche et les fruits baissent en intensité. Assez long.

Un beau rhum, fin, gourmand. Réussi dans la retenue.

Dillon Single Cask 2003 fût 1004

IMG_5155

Dillon Single Cask 2003 fût 1004 – 43%

Nez très charmeur. Plus épicé, un peu plus d’intensité que le 2004. Profil plus sombre, plus profond, plus boisé. Agrumes toujours mais comme un air de raisin, légers passages pâtissiers vanille comprise. Complexe et vraiment sympa, peut-être moins de finesse que sur le 2004 mais pas plus de simplicité pour autant.

Bouche aussi plus intense avec cette continuité de profil plus sombre, mais légère acidité des agrumes. Alcool un peu plus présent que le 2004, ce n’est pas un mal.

Finale longue sur un bois bien toasté, avec les épices douces, un peu trop dominé par cette note.

Bien, avec complexité, gourmandise, juste cette finale qui me plaît moins.

Dillon Single Cask 2003 fût 901

IMG_5153

Dillon Single Cask 2003 fût 901 – 43%

Bois intense et chaud, fruité à tendance fruits jaunes et pointe d’agrumes, épices bien marquées dont un voile de vanille. Sympa, aussi avec légers accents torréfiés.

Bouche très légère sucrosité. Plus boisé encore, toujours chaud. Gourmand mais plus simple.

Finale non dénuée d’amertume façon cacao mais toujours boisé très chaud et épices douces.

Moins complexe que le 1004, plus direct avec toujours malheureusement cette note sur la finale. Préférence pour le 1004 quand même.

Dillon Brut de colonne

IMG_5154

Dillon Brut de colonne – 71.3%

Jus de canne frais, rond, épais, qu’on imagine sucré – atypique et agréable, mais avec un manque de fraîcheur. Côté végétal émerge et va prendre un peu le pas sur ce côté lourd et apporter un peu de fraîcheur, ce qui d’une part apporte un peu d’équilibre mais de l’autre fait perdre cette identité.

Bouche à se demander où sont les degrés avec sucrosité et canne là encore.
Et sur un air connu : “Où sont les watts? Où sont les watts, watts, watts, watts ? Où sont les watts ?” Patrick, si tu nous regardes.

Finale végétale assez longue avec légère amertume.

Pas mauvais mais pas super non plus que ce brut de colonne selon moi, d’ailleurs, un petit mot sur cette catégorie de rhums. Alors oui, bien souvent, on voit sur les bruts de colonne que l’alcool est très bien intégré et les gens se pâment sur la facilité à les boire. Mais ça ne fait pas un bon rhum pour autant. Je pense qu’il serait temps de passer à autre chose que cette mode des blancs à très très forts degrés, ou alors peut-être de faire des demi-bouteilles. Je ne sais pas comment les boire à vrai dire – un peu comme ces rhums aux niveaux d’esters qui crèvent le plafond et qui offrent une intensité gustative hors norme (et qui sont bien souvent à très fort niveau d’alcool afin de rendre leur consommation encore plus simple…).

Un joli tir groupé que ces nouveautés Dillon, avec en ce qui me concerne un beau et mesuré millésime 2004 et une belle réussite sur le SC 2003 fût 1004. Les deux autres, sans être ratés, m’ont moins convaincu.
Mais outre ces quatre rhums, c’est bien cette nouvelle posture de la marque martiniquaise qui est à retenir et qui laisse présager un avenir différent – et espérons aussi qualitatif que ces sorties 2019 – pour cette maison souvent oubliée des amateurs.

5 thoughts on “Dillon et ses nouveautés 2019

  1. Tres belle analyse ! Moins mesuré que toi sur le 2004 qui fait d’ailleurs un tabac ( mais tu ne fumes pas le cigare😂)sur place !

    Like

  2. Retour très sympa! Je trouve dommage que la marque ne communique pas plus sur ses dernières sorties…Rien sur leur site, ni sur leur réseaux sociaux. Bien envie de les gouter ces 4 là!
    Merci.

    Like

    • Oui, ça manque de com c’est sûr. Comme la plupart d’entre elles ne sont pas encore vraiment sorties, peut-être cela va-t-il venir.
      Et puis ensuite, on peut se dire que s’il y avait plus de com sur Dillon, leurs rhums seraient plus cher ^^

      Like

  3. Pingback: Une transversale de blancs pur jus de canne – Les bruts de colonne – partie 4 | Les rhums de l'homme à la poussette

Leave a comment