Pour cet ultime article dédié au Rhum Fest Paris 2018, je vous réserve quelques excellents rhums et… d’autres.

Excellence Rhum Collection 2018 – Foursquare 14 ans – South Pacific 13 ans – Port Mourant 10 ans – Worthy Park 10 ans
Mais pour commencer, je ne vais pas vous parler d’une des nouveautés attendues du salon : la nouvelle collection d’Excellence Rhum. Après la première série très réussie l’année dernière, la boutique en ligne remet ça avec quatre nouveaux rhums – vous en vous en doutez, ce n’était donc pas l’envie d’y goûter qui me manquait. Mais comme vous avez pu vous en rendre compte, le nombre de choses à goûter était absolument sans précédent cette année, et comme Alexandre Beudet avait eu la gentillesse de m’envoyer des échantillons de ces quatre nouveautés, je me suis permis de faire l’impasse sur leur dégustation lors du salon. Je n’ai pas encore eu l’occasion de mettre le nez dedans mais il est probable que je vous délecte d’un article à leur sujet dans les semaines à venir.
Pour compenser cette non-dégustation, laissez-moi me rattraper en vous parlant d’un de mes gros coups de cœur de cette édition 2018. Il s’agit d’une de ces (trop) nombreuses bouteilles qui restent cachées sous le comptoir à moins de montrer patte blanche (je comprends l’idée, ces rhums ne sont disponibles qu’en petite quantité et la bouteille se retrouverait vide trop rapidement si elle était au vu et au su de toute le monde, mais c’est un peu ennuyeux. Cela m’a par exemple fait louper plusieurs Bielle ou encore un très vieux Demerara de chez Compagnie des Indes).
Et donc, étaient disponibles chez Plantation, des échantillons de deux rhums qui feront partie de la troisième série des Extrêmes de la marque. Pour les deux du fond qui ne suivent pas, cette collection est ce que j’appellerais, le haut de gamme de chez de l’embouteilleur cognaçais : des rhums disponibles en quantité restreinte, à plus haut degré et avec moins, voire pas de sucre ajouté. Des rhums moins abordables pour les débutants et clairement destinés aux amateurs ayant déjà de la bouteille (c’est le cas de le dire).
Après avoir acquis une partie de la distillerie Long Pong en Jamaïque (par le truchement du rachat de la WIRD à la Barbade), on peut s’attendre à voir fleurir les embouteillages en provenance de cette distillerie chez Plantation dans les années à venir. On ne va pas avoir à attendre des masses, puisque vont donc prochainement sortir deux Long Pond d’une vingtaine d’années dans la collection Extrême.

Plantation Extrême 3 – Long Pond 1996 – 54.8% et Plantation Extrême 3 – Long Pond 1996 – 56.2%
Le premier est à 54.8%. En trois mots, il est : complexe, fruité et gourmand. Plus en détails, au nez, la poire, la banane et l’amande se font sentir de manière très ronde. Il n’est définitivement pas Jamaïcain outre mesure, en ce sens, que les esters ne sautent pas aux narines, mais en ces temps où la course aux esters est lancée, cela fait drôlement du bien de se trouver face à un produit moins “pan dans la gueule !”. Viennent s’ajouter aux fruits, la vanille, ainsi qu’un léger côté empyreumatique. Pour finir, l’alcool est presque inexistant.
En bouche, une certaine sucrosité ressort sur l’attaque, qui vient augmenter le franc profil pâtissier de ce rhum. L’alcool se fait ici un peu plus vif et un aspect végétal apparait ce qui aide à créer le remarquable équilibre de ce rhum.
Sur la finale, des notes empyreumatiques apparaissent mais de manière moins franche que sur bon nombre d’autres rhums de Jamaïque, avec, entre autres, de l’amande et du pain grillé. On garde par ailleurs la vanille et – pour mon plus grand plaisir – le côté pâtissier !
Bordel que c’est bon !
Le second maintenant, un tout petit peu plus puissant avec ses 56 degrés et quelques est annoncé comme plus expressif grâce à ses esters et ses alcools supérieurs ; ça fait envie 🙂
Son nez est un peu plus “classique” Jamaïque mais aux arômes et à l’alcool toujours aussi fondus (et au final pas si éloigné du premier, avec un léger côté minéral en prime).
La bouche est un peu plus puissante et également plus végétale. Cette vivacité accrue se fait au détriment du côté pâtissier. Il laisse une impression un peu plus “sévère”.
Sa finale est très longue, grillée et son côté empyreumatique est accentué en comparaison du précédent.
Bon, ben c’est bien bon aussi cette affaire. Vous l’aurez compris, j’ai quand même une préférence pour le premier qui m’a vraiment laissé une belle impression.

By The Dutch – Batavia Arrack 48%
On passe du coq à la banane, pour se pencher sur une des curiosités présentes : un batavia arrack de l’embouteilleur By the Dutch. Il y avait en fait deux arracks à déguster, l’un en version 48% et l’autre en brut de fût à 61%, tous deux distillés sur pot still et vieillis 8 ans. Leur nez n’est pas sans rappeler certaines caractéristiques Port Mourant mais c’est en bouche qu’il dévoile son potentiel avec un profil intéressant, à la fois fumé, sucré, expressif et à l’alcool un peu trop marqué. Le brut de fût lui, apporte des fruits (surtout mangue) pas loin d’être pourris en plus du reste. La finale du 48% reste sur des notes fumées et légèrement mélassées tandis que le 61% vient ajouter des notes de caoutchouc brûlé en prime.
Quand on goûte ça, on se dit qu’il nous en reste des trucs à découvrir 🙂
Après ce petit écart, on revient sur du classique – et on sort momentanément des embouteilleurs indépendants – avec Foursquare et ses trois nouveautés : Premise, Dominus et le brut de fût 2005, qui succède au 2004.

Foursquare Premise 46% – Foursquare Dominus 56% – Foursquare 2005 56%
Le premier a vieilli 10 ans dans des fûts de bourbon puis de sherry et est proposé à 46%.
Son nez est typique de la distillerie, avec sa gourmandise coco, et son côté pâtissier et même crémeux ici. C’est plus le bourbon que le sherry que l’on sent. En bouche, ce dernier se fait plus présent et on garde la gourmandise, avec tout même l’ajout des notes poudre à canon. Il laisse l’impression qu’une pellicule s’est déposée et tapisse la bouche, c’est sur cette finale que l’on a le plus l’impression de faire face à une double maturation, avec l’influence des deux types de fût.
Ce n’est pas mal du tout, ça se laisse boire sans trop de difficulté mais ce n’est rien de neuf non plus.
Le Dominus, lui est présenté en “cask strenght” à 56%, il est également âgé de 10 ans mais aura passé 3 ans en fût de bourbon, puis 7 ans en fût de cognac.
La dégustation expose de manière intéressante l’influence des fûts utilisés, en comparaison du Premise. Outre le fait qu’il soit plus vif, il est moins simple sur des accents de coco, vanille et se fait plus boisé et plus complexe, ce qui compense la perte en gourmandise. Il se fera long et tannique sur la finale.
Celui-ci, du fait du vieillissement en fût de cognac, s’éloigne un peu plus des sentiers battus de Foursquare, ce qui est intéressant.
Le 2005 maintenant, intégralement vieilli en ex-fûts de bourbon pendant 12 ans, est mis en bouteille à 56%. Le 2004 avait rencontré un franc succès du fait de son rapport qualité/prix difficilement égalable.
Je ne vais pas faire durer le suspense, ce 2005 se défend très bien et est le digne successeur du 2004. Il offre vivacité, profondeur et gourmandise crémeuse, aux accents coco. La bouche se fait explosive et mesurée à la fois ; on est moins sur la coco tandis que la texture est belle. La finale est longue et la coco y revient mais n’est pas la seule, puisque des notes grillées et d’orange sont aussi de la fête.
Une nouvelle valeur sûre que ce 2005, avec comme précision, que le prix devrait rester sensiblement similaire à celui du 2004, et ça, ça fait plaisir !

Ti Arrangés de Ced’ Bio Ananas – Ti Arrangés de Ced’ Bio Orange Citron – Ti Arrangés de Ced’ GwaMaRé Citron Gingembre
Ce dernier article est un peu celui des grands écarts (vous le verrez encore plus par la suite) et nous allons donc passer sur des rhums arrangés, et pas n’importe lesquels puisqu’il s’agit des Rhums de Ced. Cédric nous avait réservé quelques nouveautés pour ce Rhum Fest, avec deux rhums arrangés bio (rhum et fruits bio donc) et sa dernière création, le GwaMaRé.
Le rhum bio utilisé nous vient du Paraguay et les deux arrangés à partir duquel ils sont élaborés sont à 21%.
Le premier est à l’ananas, un classique des rhums arrangés de chez Ced (et pas que) mais cette fois-ci il ne s’agit pas d’un ananas victoria, et cela nous donne un profil qui se rapproche bien plus des ananas “classiques”. Il est super intéressant de faire la comparaison entre celui-ci et celui utilisant l’ananas victoria. J’ai voulu faire ça parce que dans mon esprit, j’ai précisément le souvenir d’un victoria où je me suis dit “on a vachement l’ananas quand même !” ; et puis là, en goutant le bio, je me suis fait la réflexion “c’est drôlement sur l’ananas !”. Il n’y pas de secret, les deux le sont, mais de manière bien différente, sans parler du fait que le rhum utilisé est évidemment très différent 🙂
Le second est très agrumes, puisqu’il associe le citron et l’orange (tous deux en provenance du sud de l’Espagne). Le nez est hyper frais, à fonds sur les agrumes (pas vraiment surprenant je vous l’accorde), principalement sur l’orange ici. La bouche est toujours très orange, mais l’acidité du citron vient s’en mêler et accentue la fraicheur. La finale est dans la même veine avec une légère amertume.
Si vous aimez les agrumes, pas la peine d’hésiter !
Passons maintenant à celui que j’ai eu envie d’essayer depuis que j’ai eu vent de son existence, le GwaMaRé (pour Guadeloupe, Martinique et Réunion). C’est quoi qu’est-ce ?! Un blend de rhums agricoles Martinique et Guadeloupe dans lesquels sont macérés gingembre et citron galet de la Réunion. Ces deux fruits jouent à jeu égal sur le nez – le citron galet faisant très citron vert. En bouche, on a, là aussi, une belle association du gingembre et du citron. Les arômes sont bien marqués et la relative acidité équilibre le sucre. On garde cet équilibre des fruits sur la finale, qui est interminable !
Ça me plait beaucoup tout ça 🙂 Pour la petite histoire, j’étais passé sur le stand SBS et avant dégusté le New Yarmouth juste avant (qui est vraiment très long et très intense), et bien ce GwaMaRé l’a complètement chassé de ma bouche, alors que tout autre rhum aurait sans doute pâti, voire succombé à passer après cette bête 😀
Et voilà, je suis arrivé au bout de ma liste de rhums à déguster lors de ce Rhum Fest Paris 2018 ! Quel exercice ça aura été ! Mais, mais… Je m’aperçois qu’il me reste encore un peu de temps avant que le salon ne ferme ses portes… J’ai été tellement efficace cette dernière journée, que je suis allé “trop” vite. Alors que faire ? Que déguster qui ne souffrirait pas de mon palais usé par ces trois jours de salon et des bombes aromatiques par lesquelles j’ai fini ? C’est alors que j’ai l’idée de me frotter à des “rhums” que l’on a rarement l’occasion, voire l’envie de déguster. Ce genre de boissons qui mettent plus d’argent dans le contenant que dans le contenu. Et c’est donc avec cet objectif en tête que je me mets en quête de ces perles méconnues

Mauritius Dodo – Rum Deadhead – Spiced Rum Bumbu
Première “bouteille”, qui nous vient du Mexique, le Deadhead. On connait plus cette bouteille pour la forme funky de la bouteille que pour ce qu’elle contient. Je m’attendais naturellement un quelque chose d’archi sucré et aux arômes artificiels. Et j’ai eu tout faux ! Il n’est pas archi sucré, il n’est pas sucré du tout. Voilà une agréable surprise ! Bon, c’est la seule, puisque nous avons ensuite un alcool type vodka avec des arômes caramel/vanille et un boisé qui devient tannique. Non, ce n’est pas bon mais il évite le zéro pointé de par cette surprenante absence de sucre.
Vous avez quoi ? A côté de cette bouteille en forme de tête réduite, se tenait une… autre bouteille en forme de tête réduite ! Je n’ai évidemment pas pu laisser passer cette occasion. Il s’agit de la version “chocolat” du précédent, qui est en fait infusée au cacao. Là encore, pas de sucre (décidément !). En revanche, on a du chocolat au lait et de l’orange. C’est intéressant de voir que, non ce n’est pas bon, mais il arrive quand même (presque) à être une bonne surprise ! 😀
Un spiced rhum pour continuer, avec le Bumbu. De manière un peu perverse, j’étais un peu déçu qu’ils ne le vendent plus comme un rhum (non spiced). Ben ouais, parce qu’il y a moins à critiquer du coup 😉 Petit “détail” intéressant tout de même, il y a pas mal d’épices dans leur décoction, mais absolument pas de banane ; et bien vous savez quoi, ça a surtout le goût de banane. Etonnant non ?!
Finissons par un rhum qui était disponible au bar des nouveautés, le rhum Dodo. Bon, par où commencer ? Par la bouteille bien sûr ! Je me mets à la place du gars du marketing qui a pensé à avoir une réplique miniature (oui en taille réelle ça ne rentre pas) de dodo dans la bouteille. Par contre j’ai plus de mal à me mettre dans la peau de la personne qui a dit oui à cette idée. Bref, il était aussi disponible en blanc mais je n’ai dégusté que la version vieillie (je regrette un peu de ne pas avoir fait les deux, mais au moins ça me laisse quelque chose à découvrir la prochaine fois :/). Et qu’est-ce qu’il raconte de rhum arrangé dodo ? Qu’il y a beaucoup de vanille, de la noisette et de la fraise ; le tout mélangé à de la vodka, et hop vous avez un rhum ! C’est fou quand même ! Merci à la personne qui m’a conseillé de boire ça 😉

Les merveilles du salon VIP L’Esprit, Ti Ced’ et Longueteau
Voilà, s’en est fini des dégustations de ce Rhum Fest Paris 2018, mais je ne peux pas vous abandonner là-dessus, alors je vais vous dire un petit mot sur la VIP room de notre trio Ced, Longueteau et l’Esprit. A côté de leur stand où vous aviez l’occasion de déguster leurs produits, était aménagé un espace bar à cocktails qui, à l’occasion, se transformait en petit salon privé où quelques happy few avaient le plaisir de pouvoir déguster quelques raretés ou exclusivités mais surtout de parler avec leurs créateurs dans des conditions privilégiées. Ça aura été l’occasion de papoter de manière très décontractée avec ces trois grands messieurs (enfin, y’en a un qui est nettement plus petit que les deux autres ;)) du Rhum. Et puis, comme je vous le disais, quelques rhums à déguster, avec dans le désordre, un rhum agricole blanc qui a passé quelques semaines dans les marais salants, le premier Bellevue brut de fût embouteillé par l’Esprit, ainsi que leur Travellers anniversaire, mais aussi un arrangé cacao et berligou (une variété de raisin), et enfin un Blackrock blanc brut d’alambic (!), qui ne sera jamais embouteillé (!!). Bref, un excellent moment passé en excellente compagnie – et je ne parle pas que des producteurs 🙂

Tristan Prodhomme, Cédric Brément et François Longueteau – Les trois potes qui papotent
De quoi conclure en beauté ce (très long) journal de bord pour l’édition 2018 du Rhum Fest. J’espère que ça vous aura paru moins long à lire que moi à l’écrire.
A bientôt pour d’autres aventures rhumesques !
Rhum Fest Paris 2018 – partie 1
Rhum Fest Paris 2018 – partie 2
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