Mon Rhum Fest 2018 – partie 4

Que d’organisation cette année pour vous faire le récit de mes aventures Rhumfestiennes ! Nous avons passé en revue tous les blancs, avec une grosse dominante de jus de canne, puis justement les jus de canne mais vieux.
Si vous avez bien suivi, il nous reste donc les vieux de mélasse sur lesquels nous pencher. Et ça, c’est synonyme de pléthore d’embouteilleurs indépendants ! Des connus, des moins connus, des reconnus, des confidentiels, des pointus, des plus grands publiques… Bref, y’en a pour tous les goûts (et, bien sûr, de toutes les provenances).

Ouvrons cette foire aux IB (independent bottlers) avec l’un d’entre eux qui se distingue depuis quelques années avec des rhums bruts de fût (et parfois très très brut !), mais qu’il a pris pour habitude sortir en version réduite, afin de découvrir deux facettes de chacun de ces rhums et de s’adresser à deux publics différents, tout en gardant la qualité. Vous l’aurez deviné, je parle de L’Esprit, dont j’avais dégusté les blancs, avec entre autres un Martiniquais de la Favorite en brut de colonne.

L'Esprit Beenleigh and a Jamaican distillery

L’Esprit Rhum – Beenleigh distillery 78% et A Jamaican distillery 55.3%

Cette année outre les trois blancs, deux vieux étaient également présentés au Rhum Fest, c’est de ceux-là dont je vais vous parler maintenant.
Le premier des deux est un jamaïcain (55.3%) dont la distillerie n’est pas communiquée, puisque selon Tristan, cette distillerie jamaïcaine (et peut-être d’autres) ne souhaite plus voir son nom indiqué sur les embouteillages indépendants. Au nez, nous sommes sur un profil bien plus gourmand boisé (où l’amande joue un grand rôle) que jamaïcain funky. Ce n’est pas très complexe, mais sympa. La bouche est du même acabit, à l’alcool mesuré et avec, en plus, un côté terreux pas désagréable ; et la finale, moyennement longue, reste fidèle au reste de la dégustation.
Pas très jamaïcain, mais pas mal non plus 🙂

Continuons avec un rhum d’origine plus rare, l’Australie, et une distillerie au nom extrêmement peu connue : Beenleigh. Alors, qu’est-ce que ça donne un rhum qui vient de chez Beenleigh ? Ça donne qu’il faut s’en approcher avec prudence, parce que 78% ça commence à piquer. Je n’ai pu m’empêcher de faire un parallèle avec des rhums de chez Travellers, sur la coco, la vanille et le bois ; c’est donc fort agréable. On sent derrière ces arômes au premier plan, des notes fruitées. La bouche est sans surprise très puissante et les arômes sont trait pour trait identiques à ceux du nez. La finale est assez longue et dominée par la noix de coco.
C’est bon, mais je dois avouer m’être attendu à quelque chose de plus original au vu de son origine 🙂

Cane Island

Cane Island jamaica – Cane Island Barbados 8 ans – Cane Island Belize 9 ans – Cane Island Nicaragua 12 ans

Après cette mise en bouche, jetons-nous sur une nouvelle marque : Cane Island. Pour m’en faire une idée, j’ai goûté un blend et trois “single estate”, comprenez d’une seule distillerie.
Un blend de plusieurs distilleries jamaïcaines donc pour commencer, avec un profil qui nous rappelle des guyanais au vieillissement continental, sur des arômes végétaux aux esters légers et au fruité pomme/poire. En bouche et sur la finale, on y détecte un ajout de sucre et au on reste sur les mêmes notes. Pour découvrir la typicité de cette île, pourquoi pas, mais pas tellement plus.
Un Barbades de 8 ans de chez Foursquare (43%) ensuite, et on y est en plein, avec la noix de coco, la vanille et un boisé blanc et frais. On se rend compte assez rapidement que la suite n’apporte rien de plus et dans l’ensemble, ce nouveau Foursquare n’amène rien non plus à ce qui existe déjà.
Le Bélize de 9 ans et aussi à 43% est lui aussi très marqué par son origine (l’inverse eut été surprenant), mais sur des notes plus chaudes, voire grillées. Bon, rien de révolutionnaire non plus.
On termine par le Nicaragua (43% une fois de plus). Au nez, nous avons un profil sec, sur le bois, la vanille la coco (encore elle mais différente) et de légères épices. En bouche, on confirme son côté sec et boisé, voire même un peu asséchant. De plus il offre une certaine mâche. La finale se fait relativement tannique, alors que des notes de tabac, chaudes et légèrement fumées apparaissent.
Un petit quelque chose de Panama (quand pas sucré), ce qui n’est pas mal.
Bon… Un embouteilleur qui n’apporte rien de neuf, mais – selon le prix – qui peut être intéressant pour débuter et découvrir certaines origines.

Transcontinental rum Line Fiji 2014

Transcontinental Rum Line Fiji 2014 (48%)

Retour chez un embouteilleur plus connu, quoi que relativement jeune : Transcontinental. La marque de rhum de La Maison du Whisky commence à avoir une gamme développée : des réduits et des bruts de fûts d’un peu partout dans le monde. Et un des derniers en date le Fiji 2014. Qu’est-ce qu’un 4 ans à 48% peut nous offrir ? Au nez, la parallèle avec la Jamaïque est immanquable, bien que celui-ci ait sa propre identité. Il est gourmand sur l’amande, les esters et le chocolat au lait. En bouche, l’alcool est bien dosé et vif, avec toujours cette singularité pot still / gourmandise. La finale nous apporte des notes empyreumatiques en plus du reste.
Ben il est loin d’être dégueu ce petit jeune et son prix semble être tout à fait abordable.

Rum & Cane

Rum & Cane – Blends et single casks

On ne s’arrête pas en si bon chemin et on continue avec l’embouteilleur écossais Rum and Cane. Pas si jeune, puisque je vous en parlais il y a déjà deux ans ici-même.
Ils ont quelques single casks mais leur cœur de gamme se compose de quatre blends (plus ou moins définis par leur “style”).
Le Asia Pacific (mix Fiji et Indonésie) est drôlement décevant puisque l’on a quelque chose qui, à l’aveugle, fait vraiment penser à un rhum léger (distillé très haut sur d’immenses colonnes) souvent utilisé pour les rhums de type espagnol.
Le Spanish Caribbean est tout à fait inintéressant.
Le British West Indies ensuite (mélange de rhum de Trinidad et de la Barbade) est assez  facile (pas complexe) sur l’orange et les épices. Voilà, voilà…
Le dernier des quatre blends : le French Overseas, un intriguant mélange de grand arôme de Martinique et de pur jus de la Réunion. Le nez est d’ailleurs assez inhabituel et l’on détecte (même si assez discrètement) le grand arôme. La bouche est en parallèle avec le nez et l’alcool se fait un peu sentir. Je m’attendais à une finale plus longue. Sans aucun doute le plus intéressant des quatre, sans qu’il soit passionnant.
J’ai ensuite voulu me frotter à leur Grenada Single Cask, qui est à 48%. Le nez n’est pas sans faire penser à la Barbade avec des arômes de bois et de vanille mais aussi d’épices douces. La bouche et la finale sont sur des notes semblables. Il n’est pas mauvais, mais manque un peu d’originalité et de caractère selon moi.
Bon, bon, bon… Une gamme dont j’aurais pu me passer et qui m’avait lassé une meilleure impression il y a deux ans.

SBS collection

SBS Venezuela 2004 (58,9%) – SBS Guyana 1998 (62.4%) – SBS New Yarmouth 2005 (67.2%)

Et si non passait à quelque chose de bon maintenant ? Penchons-nous sur un récent embouteilleur danois, qui s’est déjà fait un nom : S.B.S. (ce qui veut dire quelque chose comme “Super Bons Shums”, oui ils ont fait une petite faute :P).
Ces petits cachotiers avaient quelques échantillons à faire goûter mais sur un stand qui ne faisait clairement pas rêver, je vous laisse juger sur la photo qui suit. Autant dire que je ne m’en étais pas approché de tout le week-end et sans le tuyau de Jérôme, je n’y aurais pas mis un pied, merci Jérôme 🙂

Stand SBS

Pas des marques qui font rêver, avec entre autres les sirops A.H RIISE et la non visibilité des S.B.S

Nous nous rapprochions de la fin de journée (de la fin du troisième jour de salon pour être précis) et je n’ai pas voulu essayer les cinq ou six de disponibles, aussi ai-je fait une sélection de trois samples à déguster. A noter que ce sont tous des bruts de fût.
Un rhum du Venezuela pour ouvrir les hostilités (2004 à 58.9%). Un nez sur le bois, les fruits à coque, la vanille et la coco pour une belle intensité. En bouche, l’alcool est bien intégré et les arômes sont semblables à ceux du nez avec cependant des légères notes torréfiées et grillées en bonus. La finale, relativement longue se fait tannique et légèrement amère alors que le trio vanille, boisé et coco est toujours là.
Pas mal que ce vénézuélien ma foi.
On continue avec un Port Mourant de 1998 (62.4%). Au nez, on ne se trompe pas, le profil PM en plein, avec du bois, de l’amande amère, de la colle… En bouche, cela change sensiblement avec des arômes inattendus : poudre à canon, brûlé. Ça, ça ne fait pas tellement Port Mourant, intéressant. La finale est longue et on retrouve le bois et la mélasse réglissée.
Un PM qui parvient à s’écarter (au moins temporairement) des sentiers battus, ça fait du bien !
Finissons en Jamaïque avec un New Yarmouth 2005 (67.2%). J’ai découvert les rhums de cette distillerie à Spa l’année dernière grâce à Compagnie des Indes.
Son nez est… super chargé ! Il s’y passe presque trop de trucs mais avec une dominante de fruits pourris et d’acidité ; hyper riche et méga funky ! L’attaque est explosive et toute la bouche est envahie d’une pléthore d’arômes tous plus expressifs les uns que les autres. En seconde lecture, on peut trouver un peu en retrait de la vanille et du bois, qui ont pour effet de “poser” un peu ce rhum, qui reste malgré tout une bombe ! La finale, très longue, va garder la bouche comme anesthésiée. N’essayez pas de déguster quoi que ce soit juste après ça, ça ne marchera pas.
Trois bons rhums que S.B.S. nous a sortis là ! Il va falloir que “j’enquête” un peu plus sur ces danois !

Compagnie des Indes - West Indies

Compagnie des Indes – West Indies blend

Nous avons commencé cet article avec un embouteilleur indépendant français, L’Esprit, finissons avec un autre : Compagnie des Indes (vous pourrez vous en faire une certaine idée en lisant, entre autres, cet article).
Ayant fait (presque) toute la gamme en un temps record, je n’ai pas d’analyse poussée de ces rhums (spéciale dédicace pour le saucisson au beaufort dont je viens, en revanche, de faire une analyse poussée – comprenne qui pourra :D).
Compagnie des Indes sort de manière très régulière de nouveaux single casks, réduits, high proof, full proof et d’origines variées. Il y avait donc à ce Rhum Fest toute une nouvelle gamme de single casks, mais il y avait aussi un nouveau blend qui viendra rejoindre le Caraïbes et le Latino (les autres blends de la marque). Ce West Indies – c’est son nom – est donc un blend de rhums provenant de 4 pays, de 8 ans d’âge. Précision importante, il n’y a pas d’ajout de sucre (quand il y en a dans ses rhums, Florent Beuchet le dit). Le nez se caractérise surtout par des arômes de coco où l’on sent l’influence de la Barbade et dans une moindre mesure du Panama. La bouche est plus complexe et légèrement douce, alors que la finale est moyennement longue. L’ensemble est assez agréable et on tient sans doute encore un de ces rhums qui peut permettre de sortir des rhums édulcorés pour aller vers des rhums plus secs et “authentiques”.
Sur les cinq rhums que nous allons maintenant survoler (tous des single casks), il est à noter qu’ils sont tous réduits à 43% ou 44% à l’exception du cinquième (d’où sa dernière position dans le line-up).

Mais juste avant d’attaquer, un petit instantané de deux visteurs du salon apercevant le stand Compagnie des Indes :
“T’as déjà goûté du rhum d’Inde toi ?
– Non
– Alors on y va !”

Compagnie des Indes - Single casks 2018
Compagnie des Indes Fiji (South Pacific) 13 ans 44% – Compagnie des Indes Guyana (Diamond) 14 ans 43% – Compagnie des Indes Trinidad (T.D.L.) 15 ans 44% – Compagnie des Indes Jamaica (Clarendon) 11 ans 43% – Compagnie des Indes Venezuela (C.A.D.C.) 12 ans 58% – Et bien sûr, une des fameuses chemises haute en couleur de Florent ! 😀

C’est parti :
Compagnie des Indes – Fiji 13 ans (distillerie South Pacific). Un rhum gourmand et vif au nez où nous avons principalement du bois, de la vanille et de la noix de coco. Sur la bouche et la finale, je l’ai trouvé toujours sympa mais avec un certain manque de caractère et d’identité.
Compagnie des Indes – Guyana 14 ans (distillerie Diamond). Un très classique rhum de chez Diamond au vieillissement continental, sur des arômes végétaux et de fruits frais légèrement épicés. La finale, comme à l’accoutumée, est sur des notes empyreumatiques mais avec la particularité de proposer également un appréciable profil fermier, qui me plait.
Compagnie des Indes – Trinidad 15 ans (distillerie Trinidad Distillers Limited). Un rhum sur la douceur avec une vanille très présente et, en retrait, le noyau de fruit. Des notes fumées/brulées sur la finale. Sans plus.
Compagnie des Indes – Jamaica 11 ans (distillerie Clarendon). On a tout de suite un nez intéressant, jamaïcain mais atypique. La classique banane est présente mais rejointe par la pomme, alors que des arômes épicés et poivrés sont aussi de la partie. Un voile fumé complète ce nez. La bouche, elle, est dominée par des notes grillées et brulées. La finale continue sur cette lancée, avec de plus en plus ce sentiment d’avoir du pain très grillé (voire cramé), sans que ce soit dérangeant pour un sou. Une belle impression générale et une curiosité pour la version à 55% !
Compagnie des Indes – Venezuela 12 ans (distillerie C.A.D.C. – 58%). Son nez est marqué par quatre arômes principaux : bois, orange, coco et vanille et n’est pas exempt de vivacité. Bien foutu. La bouche est équilibrée (on y décèle une certaine sucrosité) et l’alcool est bien dosé. Ici, comme sur la finale, bois, coco et vanille forment le trio gagnant. Sympathique que ce rhum, qui présente un pays producteur sous un autre jour, avec d’autres qualités (et moins de défauts ^^).
Voilà pour ce tour d’horizon des nouveautés de chez Compagnie des Indes, sans gros coup de cœur mais avec deux ou trois découvertes.

C’est là que je m’arrête pour cette première salve de rhums vieux de mélasse, avec comme vous avez pu le lire, beaucoup de coco de manière générale, ce que j’ai trouvé assez surprenant, mais ce trio bois, coco et vanille provient normalement des fûts de bourbon utilisés pour le vieillissement, et ces derniers sont peut-être utilisés de plus en plus souvent ou bien juste après leur remplissage initial (je rappelle que le bourbon ne peut être vieilli que dans des fûts de chêne neufs).

Je garde de côté quelques petites choses (avec de hauts et des bas, c’est le moins que l’on puisse dire) pour vous délecter d’un 5ème article Rhum Fest en mode grand écart 😉

Mon Rhum Fest 2018 – Partie 1

Mon Rhum Fest 2018 – Partie 2

Mon Rhum Fest 2018 – Partie 3

2 thoughts on “Mon Rhum Fest 2018 – partie 4

  1. Pingback: Mon Rhum Fest 2018 – partie 5 | Les rhums de l'homme à la poussette

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