Je vous l’avais annoncé il y a deux mois, j’ai eu la chance de recevoir un Calendrier de l’Avent de Rhums Australiens, créé par Ando et Norman, plus connus sous le nom de Mr and Mrs Rum.
Ce couple d’amoureux du rhum a conçu de A & Z et lancé un calendrier de l’avent uniquement consacré aux rhums australiens. Le millésime 2024 – la troisième édition – perfectionne encore leur concept et leurs sélections, avec même quelques exclusivités pour le calendrier.

Nous autres petits français n’avons qu’une idée très approximative de ce qui se fait en Australie en termes d’eau-de-vie de canne. Un peu comme aux États-Unis (dont nous ne connaissons également que très peu de distilleries de rhum), énormément de lieux de production se sont montés, qu’ils soient récents et artisanaux ou plus anciens et parfois d’échelle plus conséquente.
Pour vous donner une idée, sur les 22 distilleries représentées dans l’édition 2024 du calendrier, je n’en connaissais que 3 (Bundaberg, Husk et Beenleigh).

Afin de découvrir ces rhums, je ne vous cache pas ne pas avoir vraiment suivi le concept de calendrier de l’avent, et je me suis fait 4 séries de 6 échantillons (3 cl cirés à la main ET faciles à ouvrir). J’ai pris des notes de dégustations et des appréciations pour sélectionner les rhums qui m’ont le plus plu. Je précise que les seules informations à ma disposition étaient le nom de la cuvée, le nom de la distillerie et le pourcentage alcoolique. J’aurais pu tenter d’en savoir plus sur chaque échantillon, mais j’ai décidé de mener l’expérience “le plus à l’aveugle possible”.
Bien sûr, sur les 24, tout n’a pas été à mon goût (mais je ne crois pas qu’un calendrier de l’avent pourrait réussir ce tour de force) mais ce qui m’a le plus frappé, c’est l’incroyable variété de profils. À la dégustation, on peut sentir les différentes techniques de production, de la matière première, au vieillissement en passant par la fermentation et la distillation. Certaines références m’ont clairement fait penser à d’autres provenances (Trinidad, Cap-Vert, Réunion, Guyana…), avec leur petit twist perso.

Pour finir sur les explications, j’ajoute que chaque jour, sur la page Instagram de Mr and Mrs Rum, la découverte quotidienne était présentée au travers de sa distillerie mais aussi – voire surtout – de la méthode de production mise en œuvre pour la créer (de la matière première, au type de distillation, en passant par la durée de fermentation et j’en passe), une vraie mine d’information.

Bon, on déguste ?

Canefields Distillery – Canefields Spirit (Batch 1) – 40 %

Rhum blanc
Nez : Expressif. Fait penser à un pur jus distillé sur alambic (tendance grogue capverdien) ; canne, cuivre, sucre roux, levure, herbacé. Bien.
Bouche : Alcool bien (pas trop faible malgré les petits 40 %) et texture correcte. Sec. On retrouve nettement le même profil qu’au nez.
Finale : Longue. On garde le côté végétal (légèrement fenouil) et le cuivre.

Appréciation : Une belle découverte. J’aurais pensé distillat du Cap-Vert sans hésitation.

Husk Rum – Rare Blend (Batch 2) – 40 %

Nez : Expressif. Très gourmand sur un boisé chaud, riche et beurré. Épices. Beaucoup de bois neuf quand même, mais ça fonctionne bien.
Bouche : Alcool bien. Même partition chaude et boisée que sur le nez, avec encore plus d’épices. Toujours plaisant.
Finale : Longue. Il ne change pas, très homogène du début à la fin, et tant mieux.

Appréciation : Il reste sur sa trame et le fait bien. Un peu simple peut-être mais très plaisir ; un rhum très glouglou.

Tin Shed Distilling Co – Requiem Rum MV Tom Brennan – 46 %

Nez : Expressif. Fait penser à un jamaïcain relativement doux, voire à un Versailles (pomme, colle, un peu de taille de crayon, assez vert). Il pourrait être un peu plus rond. Bref passage malté avec de repos – oui, moi aussi ça m’a étonné.
Bouche : Alcool bien. On retrouve ce profil, avec un peu plus de texture que prévu et un léger surcroit de gourmandise.
Finale : Longue. Chaude, empyreumatique, et toujours un peu de verdeur chimique.

Appréciation : Dans son style – qui m’a vraiment fait penser à certains Demerara – il fonctionne bien.

Beenleigh Artisan Distillery – Tawny Barrel Rum – 46 %

Nez : Expressif. Le boisé saute aux narines, sans écraser le rhum, qui offre une certaine fraicheur. Fruits rouges, raisins secs, fruits à coque, léger torréfié et léger tabac. Belle première impression.
Bouche : Alcool bien. Attaque relativement douce, alors que la sensation reste sèche. Le bois, un peu coco, et un côté vineux ressortent. Agréable et simple. Puissance bien dosée.
Finale : Longue. Dominée par la noix de coco, le raisin et le bois.

Appréciation : Un rhum au nez très agréable et pas si simple, pour une bouche moins complexe mais plaisante et facile.

Kalki Moon Distilling & Brewing – The Hummock – 53.10 %

Nez : Expressif. Entre gentiane terreuse et arômes pharmaceutiques. Certaine rondeur boisée/coco sous-jacente. Pas mal. S’arrondit vanille/coco avec le temps, sans que la gentiane disparaisse.
Bouche : Alcool bien. On retrouve la gentiane un peu plus discrète, la vanille est là et le boisé discret. Texture pas mal et jolie intensité.
Finale : Moyennement longue. On retombe sur le coco et la vanille.

Appréciation : Original et gourmand à la fois. Moi qui aime la gentiane, j’ai vraiment trouvé cette particularité intéressante.

Burdekin Distillery – The JP Edition (Distillers Edition) – 45 %

Rhum blanc
Nez : Expressif. Beaucoup de fraicheur, à la fois de la canne, du citron vert et de plantes aromatiques dont la verveine. Pas trop de verdeur, un joli nez de pur jus.
Bouche : Alcool bien (pourrait même être un peu plus costaud). Texture grasse. Même fraicheur et arômes que sur le nez. Très homogène.
Finale : Moyennement longue. On garde cette fraicheur, qui se fait ici progressivement végétale et légèrement amère.

Appréciation : Un bon rhum pur jus de canne, qui en a les qualités tout en ayant sa personnalité propre grâce à ces arômes de plantes/verveine.

Winding Road Distilling Co – Coastal Cane Pure Single Rum (Barrel AR07) – 46 %

Nez : Expressif. Entre coco et notes chimiques (peinture et solvant). Pas mal de tabac aussi et un certain moelleux dans le fond. Intéressant et plaisant. Semble sec.
Bouche : Alcool bien. Il prend bien la bouche, légère astringence plaisante sur la fraicheur végétale. Un peu plus de boisé. Noix de coco et tabac toujours.
Finale : Relativement longue et sèche sur un boisé coco assez simple.

Appréciation : Un rhum au profil intéressant – surtout le nez – qui déroule tout au long de la dégustation, sans défaut.

Jimmyrum – Navy (Batch 4) – 57.8 %

Rhum blanc
Nez : Moyennement expressif. Mélasse assez discrète, sans doute distillée relativement haut, même si aromatiquement, il n’y a pas que l’éthanol, il reste assez timide. Puis, une fraicheur végétale (et épicée ?) s’installe, pour nous faire découvrir le vrai visage de ce rhum, plus réussi.
Bouche : Alcool bien. Belle texture, on gagne encore en fraicheur. Légère suavité, alors que la puissance est parfaitement dosée pour porter l’intensité.
Finale : Moyennement longue. La fraicheur va progressivement disparaitre en asséchant légèrement la bouche.

Appréciation : Il continue mieux qu’il ne débute et il faut lui laisser un peu de temps pour qu’il s’exprime pleinement. Sans être funky ou extrême, il s’en tire bien et sa bouche est très agréable.

Killik Handcrafted Rum – Discovery – 69 %

Nez : Expressif. Essentiellement du dissolvant à vernis à ongles dans un premier temps. Arrive ensuite, en retrait, une facette boisée et crémeuse à tendance vanillée, puis du tabac, de plus en plus de tabac. Il devient plus sombre. Le dissolvant, toujours présent, se transforme partiellement en bonbon anglais.
Bouche : Alcool présent. En prendre une goutte suffit à faire exploser les arômes et à bien occuper la bouche. Le boisé mâtiné de coco et de tabac est au premier rang. Le bonbon anglais (et moins dissolvant maintenant) arrive derrière. Asséchant.
Finale : Relativement longue. Le coco domine aux côtés du bois.

Appréciation : Le premier de livrait trop monolithique, puis la suite (entre repos et étapes suivantes de dégustation) ont permis de montrer son vrai potentiel.

Mt Uncle Distillery – FNQ Rum Co Iridium – 40 %

Nez : Moyennement expressif. Pas mal d’épices (dont du poivre), un peu de coco, de bois précieux, des touches de torréfaction. Plus complexe que prévu, pour le mieux.
Bouche : Alcool bien. Assez sombre, toujours avec les épices. Moins complexe et un peu moins marquante.
Finale : Longue, retour d’une gourmandise épicée bien foutue. Puis une vague vanillée arrive assez vite.

Appréciation : Un réel intérêt, surtout au nez, puis plus de gourmandise sur la suite de la dégustation, surtout la finale.

Vous l’aurez compris, qu’il s’agisse de rhums blancs, de rhums vieux, de pur jus ou de mélasse, le très large éventail de références et de styles m’a séduit. Ces 10 rhums que je viens de vous présenter m’ont plu mais certains autres, non mentionnés ici, se distinguent aussi (l’un m’a par exemple immédiatement fait penser au HERR de Savanna).

Si vous êtes en quête de variété et de découvertes, si vous souhaitez sortir de vos références habituelles (qu’il s’agisse des embouteillages distilleries ou des IB), ou simplement si vous voulez en apprendre plus sur les rhums australiens, vous feriez bien de jeter un œil à ce calendrier (qui est en vente en France chez Excellence Rhum).
À vous de voir si vous désirez attendre la version 2025 et découvrir le calendrier en bonne et due forme ou si, comme moi, vous aspirez plus à comprendre ce qui se fait de l’autre côté de la Terre en matière de distillat de canne, et dans ce cas, pourquoi attendre ? 😉