Admiral Rodney est une marque de rhum de Saint Lucie, rhum produit chez Saint Lucia Distillers, distillerie appartenant à Spiribam (également propriétaire des Rhums J.M et Clément).
Ce nom me ramène à mes débuts de découverte du rhum, en 2013, alors que j’avais de manière iremmédiable entamé le virage vers des rhums sans sucre. J’en garde un bon souvenir, typiquement de ces rhums gourmands mais sans édulcoration, même si d’une trame assez simple.
Depuis quelques années, la gamme – jusqu’alors composée que d’une unique référence (à ma connaissance) – s’est étoffée, passant depuis peu à quatre bouteilles. Je n’avais jamais eu l’occasion de m’y frotter mais voilà qui est désormais chose faite (merci Marie pour les échantillons !).
Je m’en vais donc vous relater mes impressions de dégustation de ces rhums formant la flotte de l’Admiral Rodney.
Admiral Rodney – HMS Princessa – 40%

Admiral Rodney – HMS Princessa – 40%
Au premier nez, c’est une impression gourmande et sèche qui se dégage. Le bois est présent et bien accompagné par les fruits à coque, l’orange, les épices et le caramel. C’est assez doux mais assez intense malgré le faible degré alcoolique. Une petite pointe médicinale vient vivifier l’ensemble. Sur le deuxième nez, l’alcool ressort – normal – mais ce n’est pas tout puisqu’en plus des premiers arômes sentis, viennent s’ajouter la vanille et les raisins (qui ne sont pas là pour faire de la figuration), ce qui ne fait qu’accentuer son caractère gourmand. Il perd cependant en fraicheur et le boisé se fait plus discret, ce qui le déséquilibre un peu.
En bouche, on retombe sur nos pattes, avec une grande douceur (mais sans aucun sucre), comme confortable. On retrouve essentiellement le bois et la vanille et c’est tout. Un peu trop simple que cette bouche ; elle manque de gourmandise.
La finale devient de plus en plus sèche, comme si elle déposait un voile de matières sèches sur la langue et c’est fort agréable, comme s’il nous offrait son essence. C’est le bois, le tabac et une touche de noix vanillée qui demeurent, et ce pour un long moment.
Le nez se défend, la bouche en revanche beaucoup moins, mais c’est en fait la finale qui m’a le plus plu. Définitivement un rhum pour amener les amateurs de rhums sucrés vers des choses plus qualitatives.
Admiral Rodney – HMS Formidable – 40%

Admiral Rodney – HMS Formidable – 40%
Au premier nez, il se fait plus discret et moins gourmand que le précédent. Le boisé est moins marqué et il se présente à nous sous une facette plus fraiche, avec des notes minérales et végétales. Heureusement les épices douces et la vanille ne sont pas bien loin et apportent un certain équilibre. Le rhum étalé sur les parois du verre fait très nettement ressortir le boisé et le tabac et les raisins apparaissent. Ces derniers semblent avoir séjourné dans une infusion de vanille. Une discrète pointe de figue séchée vient conclure cette première phase de la dégustation.
En bouche, l’attaque est tout de suite plus flatteuse que celle du Princessa. Des notes torréfiées, de tabac, de bois et de vanille ; il se passe clairement plus de choses et c’est tant mieux. La toute fin de bouche, à peine le rhum avalé offre une belle explosion gustative qui va perdurer sur les premières secondes de la finale.
Cette dernière est plus sombre (et plus intense) mais donne toujours cette même impression asséchante que j’apprécie. Le bois et la noix sont toastés, le tabac brun (je ne sais pas si ça se dit mais c’est mon impression) et la vanille bien grasse. Ces notes vont accompagnent un très long moment et on ne va pas s’en plaindre. Après plusieurs minutes, c’est comme si les raisins revenaient de faire une place, étonnant.
Je l’avais trouvé un peu sur la retenue au nez (donnez-lui du temps dans le verre, il le mérite), mais la suite nous fait comprendre qu’il a passé plus d’années en fût que le Princessa. Mention spéciale pour cette transition entre bouche et finale, vraiment plaisante et chaleureuse !
Admiral Rodney – HMS Royal Oak – 40%

Admiral Rodney – HMS Royal Oak – 40%
Le premier nez nous offre un profil boisé vif, plus sombre que les le Formidable et le Princessa, avec des accents cacaotés et de pruneaux. L’alcool ressort un peu plus, alors que les épices sont légèrement poivrées voire mâtinées de gingembre. Peut-être le plus original mais pas le plus équilibré pour moi. Sur le deuxième nez le bois se fait plus gourmand et on sent bien le vieillissement en fût de bourbon. On l’imagine sec mais non dénué d’une sensation de douceur, il va falloir vérifier ça.
En bouche, une très légère douceur annonce plus de gourmandise et de complexité que le Princessa. On y retrouve l’influence du fût mais aussi de la vanille, des raisins et du tabac pour un résultat plaisant sans être extraordinaire.
La finale est très exactement entre celles des deux précédents : tabac, noix, vanille et bois, le tout moins sombre que sur le Formidable (mais l’on y retrouve cette très agréable fin de bouche). On retrouve ce côté asséchant qui m’apparait vraiment comme un marqueur commun à tout cette gamme. C’est la noix qui joue ici les prolongations.
Ce Royal Oak n’est pas mal et se situe à plus d’un titre entre le Princessa et le Formidable. J’avais pris le parti de décider de mon ordre de dégustation en fonction des nez, juste après avoir versé les rhums dans les verres. Ce n’est qu’a posteriori que j’ai regardé leurs âges et ce Royal Oak se trouve en effet être le benjamin, alors que le Formidable est l’ainé et le Princessa le cadet de ce trio. Bref, il y a une certaine logique dans tout ça.
Admiral Rodney – Officer’s Releases n°1 Port Cask Finish 2006 – 45%

Admiral Rodney – Officer’s Releases n°1 Port Cask Finish 2006 – 45% (photo : @thatsronan)
Le premier nez est immédiatement plus expressif que les trois autres et nous donne aussi l’impression d’être face à un rhum plus vieux. Les raisins mènent la danse mais la piste est également occupée par le bois, l’orange et le chocolat au lait. Une discrète note de poudre un canon est assise sur un banc à côté de la piste de danse et tient le sac de ses copines. Equilibre et intensité sont au rendez-vous, ça commence bien. A noter que lorsque j’ai mis mon nez dedans la toute première fois, j’ai étonnamment presqu’eu une impression de rhum agricole. Une fois bien aéré sur les parois du verre, il ne fait que confirmer la première impression : il envahit littéralement le nez et un nouveau couple se joint à la fête : le tabac et la vanille ; ils font un sacré numéro sur le dancefloor. Ce Officer’s Releases n°1 se distingue vraiment des trois autres de par son profil plus expansif.
En bouche, on reste sur ce profil très expressif, qui explose dès l’attaque. Il est moins « consensuel » que les trois autres et propose un profil plus marqué. Il propose des fruits, du tabac, de l’amande mais aussi de la vanille et de la réglisse. On retrouve également la note de poudre à canon (qui vient sans doute du finish en fût de porto) et il y a un petit quelque chose de dessert aux œufs, qui apporte un peu plus de gourmandise. L’alcool est bien dosé.
La finale longue et… asséchante. Des notes torréfiées de cacao se font remarquer, mais aussi des épices, ainsi que quelque chose de fruité. Le boisé, le tabac et une petite touche fumée complètent cette finale, plus ronde que celles des trois rhums de la série HMS.
C’est sans aucun doute celui des quatre qui a l’identité la plus forte et peut-être cela est dû au distillat puisque ce rhum est « distillé sur les plateaux les plus bas d’une colonne Coffey still ». En tout cas ce qui est sûr c’est qu’il vraiment expressif et c’est une de ses qualités principales !

Admiral Rodney – Line up
Un agréable voyage à Sainte Lucie, avec une gamme HMS très homogène et un Officer’s release qui sort du lot. Il y a une évidente progression entre le Princessa, le Royal Oak et le Formidable avec une influence du fût de plus en plus marquée et un profil de plus en plus sombre. Et puis cet Officer’s Releases n°1 qui se démarque clairement des trois autres en s’écartant des marqueurs gustatifs Admiral Rodney (sans les quitter tout à fait), en développant des notes plus exhubérantes.
Ah et au fait, HMS signifie His/Her Majesty’s Ship ! Ne me remerciez pas, vous pourrez enfin briller aux soirées de l’ambassadeur 😉