Démesuré, voilà le premier mot qui me vient à l’esprit pour évoquer l’édition 2023 du Whisky Live Paris. Des spiritueux dans chaque recoin, sur (presque) trois étages, les bouteilles étaient partout : sur le Plateau Dégustation, à la Rhum Gallery, dans la Boutique Éphémère, le long de la Gin Lane, au Carré Collector, du côté du Saké District et, bien sûr, dans le coin de la partie VIP. Partout, que je vous dis !

Tout déguster ? Une semaine n’y suffirait pas et je ne parierais même pas sur deux. La tâche est titanesque. Mais de toute manière, qui voudrait tout goûter ? Il faudrait avoir un pet au casque. Je ne serais personnellement pas contre, mais j’ai quelques Vögelchen im Kopf – je vous laisse chercher.

Bref, il faut venir organisé, préparé et avec un plan (et des heures de sommeil engrangées). Je vous en ai déjà parlé sur ce blog ou sur le Single Cast. Mon but cette année ? Déglinguer le plus de spiritueux possible, avec une convergence sur le VIP ! Objectif simple dit comme ça mais pour ce faire, il faut gagner du temps. Repérer ce qui sera disponible en jetant un œil au site de l’événement et en essayant de mettre la main sur le catalogue. Heureusement, cela a pu être le cas deux jours avant le début des hostilités, ce qui m’a permis de préparer le squelette de mes notes de dégustation. Pour ceux qui ne voient pas à quoi ça peut ressembler, ce n’est pas sorcier et ça donne ça :
Rhum-de-ouf-qui-tue – 92%
Nez :
Bouche :
Finale :
Whisky-de-dingo-foufou – 42.5173%
Nez :
Bouche :
Finale :
Et ainsi de suite pour tous les rhums, whiskies, cognacs, mezcals, shochu, calvados, sakés, armagnacs, eaux-de-vie, liqueurs, crachoirs (ah non, nous ne sommes pas au Rhum Fest Londres) que vous souhaitez découvrir. Je m’étais fait un fichier “Rhum” et un autre “Whisky”.
Oui, ça prend un peu de temps et c’est très rébarbatif mais ce sont de précieuses minutes de gagner lorsque vous serez avec votre verre dans une main, votre téléphone dans l’autre, en train de sérer la pogne d’une connaissance.

Bien sûr, cela ne doit pas vous fermer à des découvertes sur le tas ou à suivre des conseils soufflés par des haleines chargées au détour d’une fontaine à eau.

Bref, j’étais paré pour l’ouverture samedi midi, non sans avoir ingurgité 12 croissants aux amandes au préalable.

Je ne vais pas vous parler des produits que j’ai dégustés dans l’ordre où ils se sont enchainés sur mes papilles mais plutôt par famille ou groupe. Oui, que ne ferais-je pas pour faciliter votre lecture ? Je commencerai chaque article par le rhum, puis m’attarderai sur les whiskies et autres distillats de vin.

RHUM

J’ai débuté mon aventure rhum sur ce Whisky Live 2023 par les sélections de La Maison du Whisky.

Papa Rouyo 2022 Vibrasyon fût de Cognac – 64%

Élevé sous bois
Nez : pur jus distillé sur alambic à repasse évident, pâte à modeler, amande, pêche
Bouche : grosse sucrosité, jus de canne, trop puissant
Finale : jus de canne sur potstill avec son côté métallique

Chalong Bay Lunar Series Shochu Cask – 60.7%

Nez : expressif sur un joli mix jus de canne et beurre
Bouche : tabasse un peu mais on retrouve cette association réussie et une belle texture

Neisson Straight from the Barrel N°410 – 52.7%

Nez : gourmandise boisée caramélisée mais aussi taille de crayon, légère fraîcheur mentholée
Bouche : intense, boisée, sombre, très suave
Finale : caramel cuit et bois
Pas mal mais peut-être un poil trop boisé

Neisson Straight from the Barrel N°657 – 58.1%

Nez : un peu alcooleux, intense encore une fois, fruits confits, sombre
Bouche : vif mais une belle unité entre les différents éléments
Finale : on retrouve ce boisé sombre mais qui fonctionne bien

Pour rappel, j’ai déjà dégusté le N°88 et vous en parlais dans cet article.

Rhum J.M 2015 Single Barrel (7 ans) – 55.2%

Nez : boisé très flatteur et relativement complexe qui prend le pas sur le reste
Bouche : boisée également, très suave mais avec agrumes, vanille, fruits secs
Finale : on reste sur ce boisé vanillé avec des fruits à coque
Hyper gourmand sur le bois et assez loin de l’identité J.M, j’ai bien aimé.

Penny Blue 2011 (11 ans) Sherry Cask – 60%

Nez : distillé haut où le bois a marqué, léger empyreumatique, caramel. Puissant
Bouche : douceur, alcool bien finalement, sherry
Finale : très confit, très sherry
Facile et plaisant.

Chairman’s Reserve 2006 (15 ans) – 59%

Distillé sur alambic Vendome
Nez : expressif et alcooleux, pêche, épices, empyreumatique, boisé cramé
Bouche : trop boisé et pas mon truc
Finale : longue, ce qui ne fait pas mes affaires…

Chairman’s Reserve 2010 (11 ans) – 61.1%

Nez : un peu moins expressif que le Vendome mais beaucoup de bois avec taille de crayon, léger côté pâtissier au fond du verre
Bouche : puissante, boisée
Finale : très sucré cuit

Je crois qu’il faut que j’arrête les Sainte Lucie 100% potstill, ils sont bien trop rarement à mon goût.

Takamaka 2019 Le Clos Series Ex-Pineau – 56%

Nez : bois neuf, amande, menthol, agrumes
Bouche : liqueur de plantes, cacao, caramel
Finale : moins longue que prévue et très boisée

Takamaka 2019 Le Clos Series Ex-Palo Cortado – 53%

Nez : soufré et oxydatif
Bouche : même chose avec une minéralité de type whisky
Finale : alcool reste un peu

Deux rhums bien étranges proposés par Takamaka.

Isautier 2006 (15 ans) L’Audacieux brut de fût – 72.8%

Rhum agricole
Nez : intense sans problème d’alcool a priori, gourmandise et fraîcheur mais petit manque de signature
Bouche : trop puissante, écrase un peu les saveurs
Finale : sucre roux, chaud, léger menthol, bois

Isautier 2006 (15 ans) L’Audacieux – 58%

Rhum agricole
Nez : mieux en réduit, amande, vanille, léger agrumes, léger pâtissier/sucré roux
Bouche : alcool tout de même présent, léger bakélite/sucre cuit
Finale : sucre cuit, caramel cuit, boisé

Isautier 2008 (13 ans) L’Aventurier brut de fût – 79.5%

Rhum de mélasse
Nez : on a cette identité Isautier mélasse que je commence à identifier et qui me plaît beaucoup avec un côté un peu cramé
Bouche : pas forcément plus puissante que l’audacieux mais quand même trop fort
Finale : long sur des notes empyreumatiques et un peu de plastique chaud

Isautier 2008 (13 ans) L’Aventurier – 58%

Rhum de mélasse
Nez : a priori le mieux des quatre, plus mesuré en alcool et plus gourmand
Bouche : encore de la sucrosité, trop empyreumatique
Finale : pareil

Bon, j’ai nettement préféré les versions réduites sur cet Aventurier et cet Audacieux. Mais j’ai encore trouvé plus à mon goût les versions officielles : Apollonie, Antoinette et Louis & Charles. J’avais pu les goûter quelques jours avant le salon et l’impression générale était très positive. J’essaierai de vous en parler soit sur le blog, soit dans un des magazines pour lesquels j’écris.

La Maison du Whisky Cambodia 2018 (5 ans) – 58.3%

Nez : beaucoup d’amande, sucre roux, pâte à modeler
Bouche : un peu fort, original, toujours amande, sucrosité
Finale : pâte à modeler, long, très cuit

La Maison du Whisky Barbados 2006 (16 ans) – 60.8%

Nez : très Barbade avec une belle intensité qui se traduira peut-être par trop d’alcool. Coco, vanille, amande
Bouche : alcool qui fonctionne et un beau Barbade bien concentré
Finale : classique, bien fait

Rum Nation Jamaica 2017 (5 ans) – 58.5%

Nez : amande/pâte à modeler (oui, je dois être dans une période Play-doh en ce moment)
Bouche : ananas, sucré, texture, boisé pour un 5 ans
Finale : cendres

La Maison du Whisky Jamaica 2010 (13 ans) – 68.1%

Clarendon
Nez : je n’aurais pas forcément dit Clarendon. Belle rondeur, équilibre bois et fruits
Bouche : trop fort mais aromatiquement pas mal
Finale : plaisante et assez longue
Pas mal mais trop fort

Plantation Jamaica HJF (Hampden) 2008 – 61.8%

Nez : ah ben voilà, bienvenue en Jamaïque ! Très ananas, colle et dissolvant. Un peu de bois et d’amande
Bouche : intense et concentrée
Finale : olive et ananas, empyreumatique
Pas mal ce Hampden à vrai dire

Plantation Jamaica ITP (Long Pond) 2000 – 62%

Nez : dans la mesure, tant fruits que bois
Bouche : intense, plus boisée que le nez. Fin de bouche sur une bouffée très sympa. Bien vif
Finale : dans la lignée de cette ultime explosion en bouche

Plantation Jamaica (blend Worthy Park et New Yarmouth) 2010 – 61.4%

Nez : très beurré, pas très Jamaïque, peu d’esters qui ont laissé de la place au fût
Bouche : on a un peu d’ananas ici mais toujours cette douceur beurrée
Finale : encore un peu d’ananas et de la rondeur, un boisé moelleux

Mhoba Umbila (Bourbon Barrel) – 59.7%

Nez : Mhoba ? Oui ! Pur jus où le bois est assez discret tant le distillat est expressif
Bouche : sucrosité, alcool maîtrisé, bois plus présent, qui arrondi le profil
Finale : il a beau avoir 42 mois de fût, le jus est toujours là, impressionnant

Mhoba Umganu (Brandy Cask) – 64.9%

Moment d’absence, quelqu’un a dû me parler pendant que j’essayais d’écrire ma note. Oui, toi qui lit cet article, c’est de TA faute !

Mhoba Indlovu (Double Maturation) – 58.5%

Nez : bien plus high esters que pur jus. Plus de bois aussi, sucre roux
Bouche : sensations de resserrement de papilles sympa
Finale : très sucre (pas sucré)

WHISKY

Redbreast 22 – 58,3%

Full Sherry Oloroso – comprenez : l’intégralité du vieillissement de ce whisky irlandais s’est passé dans un ex-fût de sherry Oloroso.
Nez : le distillat a laissé énormément de place au fût avec son lot d’épices et de fruits secs
Bouche : gourmand (presque trop gras et épicé), la texture et la douceur donnent une impression presque liquoreuse
Finale : chocolat

Quatre whiskies anglais maintenant.

Costwolds 2016 – 62,4%

Nez : banane et pomme
Bouche : encore très fruité
Finale : mêmes fruits
Trop simple

Bimber fût de cognac – 58,9%

Nez : agrumes, pourrait être plus expressif, fruits confits
Bouche : alcool très bien, un peu trop boisé mais un boisé gourmand et complexe
Finale : sur ce même boisé, pruneaux

Bimber fût de bourbon – 58,7%

Nez : à nouveau pas mal de bois, bourbon cette fois
Bouche : un peu plus vif et manque d’arômes
Finale : on retrouve notre bourbon, la matière première manque

Bimber fût d’Imperial Stout – 56,8%

Nez : plus complexe et tant mieux, vanille, torréfié, miel, gourmand
Bouche : texture, suavité, comme des tannins
Finale : décidément beaucoup de miel
Le plus original mais j’ai préféré le cognac

On enchaine avec les États-Unis.

Blanton’s Single Barrel pour LMDW – 64,4%

Single Barrel brut de fût
Nez : banane (un peu), beurré, vanille, un peu d’épices
Bouche : rondeur, alcool bien
Finale : très agréable, grillée et pâtissière

Willett Single Barrel Bourbon 6 ans – 64,7%

Nez : plus puissant, plus épicé
Bouche : boisé, épicé, un peu fort
Finale : l’alcool épicé reste et une facette pâtissière arrive

Michter’s Straight Rye – 46,4%

Nez : épices et un peu de grillé mais pas tellement, léger terreux, pâtissier
Bouche : très doux (20 degrés de moins, ça se sent)
Finale : les épices montent un moment, vanille

Willett Single Barrel Rye 6 ans – 53,7%

Nez : je crois que mon nez n’est plus d’attaque, je n’ai pas un rye franc, quoique quand même pas mal d’épices
Bouche : belle texture et ici le rye on l’a, épicé, pain grillé, très belle fin de bouche
Finale : vanillée, pâtissière, chaude et encore un peu d’épices

Terminons en beauté ce premier article dédié au Whisky Live Paris 2023, avec la dégustation de deux whiskies japonais, dont un ouvert pour la première fois en France à l’occasion du salon.
J’ai eu l’honneur d’être convié à un petit événement dans l’événement sur le stand Suntory. Était planqué à l’arrière de l’espace occupé par la marque japonaise, un petit salon pouvant tout juste accueillir trois personnes (encore mieux, nous n’étions que deux). Le brand ambassador de Suntory, Christophe Davoine, officiait derrière un comptoir en bois pour guider les chanceux durant la dégustation du Hibiki 21 ans classique, puis de la version créée pour le 100ème anniversaire de Suntory.

Hibiki 21 ans classique – 43%

Hibiki, assemblage des trois distilleries de la marque (Yamazaki, Hakushu et Chita), jusqu’à six types de fûts différents, dont le Mizunara. Objectif : Harmonie et Équilibre.
Nez : fin sans manque d’intensité, fruité, légèrement malté, boisé présent mais mesuré, ciselé, le pâtissier arrive
Bouche : encore cet équilibre avec l’apport en plus de caramel, de notes torréfiées, un peu plus chaud, miel, fruits secs
Finale : un peu plus boisée, longue, reste intense un moment

Hibiki 21 ans 100ème anniversaire Suntory – 43%

L’âge moyen de l’assemblage augmente et les fûts de mizunara occupent plus de place (au détriment des ex-fûts de sherry).
Nez : plus intense, plus chaud, un peu plus épicé, légère note tourbée (non détectée dans le classique), prune, orange
Un peu d’eau ouvre encore plus les arômes et accentue la facette pâtissière.
Bouche : on retrouve cette chaleur épicée ainsi que la note légèrement tourbée, peut-être plus boisée aussi, ce qui serait logique étant donné son plus grand âge.
Finale : reste intense très longtemps
Il « efface » le classique, qui était pourtant déjà exceptionnel.

Après ces quelques dégustations, il fallait bien souffler un peu, alors je suis naturellement allé à la Cocktail Street pour me détendre et arrêter de tout cracher. Je ne vais pas m’étendre mais il est parfois bon de suivre ses propres conseils : ne pas se lâcher à la Cocktail Street si on veut être d’attaque le lendemain…

Whisky Live Paris 2023 – Partie 2
Whisky Live Paris 2023 – Partie 3
Whisky Live Paris 2023 – Partie 4

Si vous voulez vous rafraichir la mémoire sur l’édition 2022 du Whisky Live, c’est par-ici :
– Mon Whisky Live 2022 – Partie 1
– Mon Whisky Live 2022 – Partie 2
– Mon Whisky Live 2022 – Partie 3
– Mon Whisky Live 2022 – Partie 4