L’année dernière, je vous présentais quatre embouteillages de L’Esprit Rhum (dans cet article). Mais il se trouve qu’en début d’année, Tristan, l’homme derrière ces sélections, m’envoya trois échantillons supplémentaires dont deux sortis en 2022. De quoi faire un petit rattrapage !
MEK (Enmore) 1991-2022 – 50%
À noter que Tristan n’a finalement pas opté pour embouteiller ce rhum qu’il a trouvé trop boisé.
Nez : on se prend une claque du fût, un fût fortement bousiné. Il faut aller chercher le café, la vanille et les chouchou derrière ce premier écran boisé. Avec du repos, il gagne encore en « noirceur » et nous offre de la mélasse réglissée et des notes de cendres, fumées. Le second nez redistribue quelque peu les cartes, ou plutôt, fait retomber au fond du verre ce côté très sombre. Apparaissent même des pruneaux et des cerises à l’eau-de-vie. Toujours pas de fraicheur conquérante mais un peu plus d’équilibre.
Bouche : le boisé est bien en place, pas de doute ; il se fait même un peu piquant. Compliqué pour les autres acteurs de se faire une place. Le tabac, le café et la réglisse y parviennent mais ne font que renforcer son côté bien noir.
Finale : longue, très boisée (non, ce n’est pas une surprise), elle s’arrondit un tout petit peu grâce à la vanille et au caramel grillé.
Ce n’est pas tous les jours que l’on déguste un Guyana de trente ans mais ici le poids des ans se fait trop sentir et pas de la bonne manière. Je le classe dans la grande famille des « jus de bois ».
L’Esprit Rhum Clarendon 2013-2022 – 67.7%

Nez : la Jamaïque certes mais pas dans ce qu’elle a de plus extrême. Se présentent à notre nez un pot-pourri d’arômes fruités (pomme et poire), épicés, herbacés et crémeux. Il n’est pas sans rappeler, par certains côtés, le premier Clarendon sorti l’année dernière par l’embouteilleur. Se détecte également le contenu d’un taille-crayon. L’alcool titille les poils du nez. Il donne l’impression d’être non dénué de sucrosité. Après un moment ressort un parfum floral capiteux.
Bouche : en effet, il est étonnamment doux. Beaucoup d’intensité sur cette bouche (autant en alcool qu’en arômes) et une impression globale très gourmande (accentuée par cette suavité mesurée). On retrouve nos fruits épicés, notre côté crémeux (quoique plus pâtissier ici) et du bois. L’ensemble fonctionne très bien.
Finale : longue, elle est dominée par ce crémeux vanillé qui enrobe bien le bouche, du palais à l’arrière de la langue. Quelques épices donnent du peps au côté de ce boisé, qui prend encore le visage de taille de crayon.
J’ai bien aimé ce Clarendon. Décidément, voici encore une belle sélection jamaïcaine de la part de Tristan Prodhomme, qui évite l’écueil de ces Clarendon continentaux qui manquent cruellement de plaisir.
L’Esprit Rhum New Yarmouth 1994-2022 – 67.4%

Nez : deux mots, gourmandise et concentration. Noix de coco grillée, noisette torréfiée, vanille, un vrai dessert liquide. Comme sur les autres New Yarmouth 1994 (Excellence Rhum et Swell de Spirits), c’est le fût, bien plus que le distillat, qui a la mainmise sur ce rhum. Un tabac enduit de caramel se joint à la fête sans en bousculer le profil.
Bouche : confirmation totale ! Le coco grillé est en première ligne, bien épaulé par la noisette, la vanille et le tabac. On garde nos acteurs, pour une représentation guidée par la gourmandise et la richesse. La texture ne fait qu’accentuer cette impression. Il colonise littéralement toute la bouche, s’insinue dans les moindres recoins.
Finale : dans le même esprit (sans jeu de mot), noix de coco, praliné, tabac…
Décidément, étonnant cet arrivage de New Yarmouth 1994 chez tant d’embouteilleurs mais je ne vais pas m’en plaindre. C’est bon.
C’est tout pour aujourd’hui !