Cela fait quelques années que je suis juré dans la catégorie Rhums et Punchs au Concours Général Agricole (je n’ai pas de mérite, n’importe qui peut s’y inscrire). Depuis 2015 – première année à juger les rhums à l’aveugle – je passe ensuite le reste de la journée sur le salon, essentiellement dans le hall qui héberge les produits de la France d’Outre-mer, afin d’y découvrir ou redécouvrir des purs jus de Guadeloupe, de Polynésie Française ou encore de la Réunion. Cette année n’a pas fait exception, même s’il y eut quelques changements.
Laissez-moi vous raconter l’essentiel de mon expérience Concours Général Agricole et Salon de l’Agriculture.

Pour ce qui est de ma participation en tant que juré, nouveauté cette année, puisque, outre les rhums, je me suis également inscrit dans la catégorie Armagnacs. Pas malchanceux, j’étais à une des tables jugeant des armagnacs XO jusqu’au compte 19.
Ceux qui se sont déjà livrés à ce type d’exercice le savent, la qualité de l’expérience dépend grandement des camarades de table. Je n’ai pas eu à me plaindre. Nous étions quatre, de profils différents, tous ouverts et à l’écoute des autres. Un bon moment et un essai transformé sur cette eau-de-vie de raisins.

C’est le lendemain matin que le concours Rhums et Punchs avait lieu. Après avoir retrouvé et salué bon nombre de connaissances, je me dirigeai vers ma table et fus drôlement surpris d’y trouver 11 échantillons ! Normalement, on tourne entre 5 et 7 bouteilles… C’est à l’examen du nom de la catégorie à juger que je compris pourquoi nous avions tant de produits à juger. Ce n’était en fait pas une mais deux catégories que nous devions déguster : les rhums vieux IG Guadeloupe de 4 ans minimum et les rhums vieux IG Guadeloupe de 6 ans minimum. Autrement dit, nous allions “décider du sort” des VSOP et XO de Guadeloupe, rien que ça – d’autant que nous étions la seule table sur ces dénominations.
Là encore, nous n’étions que 4 et malgré des avis pas toujours à l’unisson, nous avons pu nous accorder sur les médailles à attribuer. Une médaille d’or dans chaque groupe. Ce n’est que le lendemain que j’ai appris quels rhums avaient recueilli nos votes et je ne fus pas mécontent des résultats. En effet, le VSOP médaillé est le Bielle 2018 et le XO vainqueur, le Bologne XO. Du bon boulot ! 🙂
Je suis ensuite allé me perdre dans les allées du hall 5, où j’ai bien entendu croisé ou recroisé pas mal de connaissances également venues étancher leur soif de découvertes.
Bielle – Marie-Galante

Premier arrêt, comme à l’accoutumée : Bielle. J’aime toujours débuter par le line up de (presque) toutes les références blanches de la distillerie de Marie-Galante.
Relative déception cette année néanmoins sur ces blancs. Le Baltazia qui m’avait tant plu l’année dernière ne m’a pas entièrement convaincu, même si c’était l’un des meilleurs, aux côtés du classique Bielle 50. La nouveauté qu’était le Bio ne fut pas à mon goût, avec ses accents légumes trop prononcés.
Les vieux auront dû attendre que j’en finisse avec les autres blancs du salon.
La Part des Anges – Île de la Réunion
Un autre classique du salon : la distillerie La Part des Anges de la Réunion. C’est le seul endroit où l’on peut déguster leurs produits et il ne faut pas s’en priver.

La Part des Anges – Sublim’ Canne – 55%
C’est un véritable travail d’orfèvre qui est réalisé sur la canne. La première fois que j’ai découvert leur rhum – le Sublim’ Canne – il était présenté à 45%, et alors qu’il avait un profil gustatif tout à fait unique (certains diront marron glacé, ils se reconnaitront), il souffrait d’un relatif manque de peps. Deux ans plus tard, une nouvelle version, à 55% celle-ci, avait fait son apparition et il était possible de comparer les deux. Mais voilà, les 10 degrés supplémentaires atténuaient quelque peu la forte identité du 45%.
Cette année, seule le plus fort était en dégustation, et pour la première fois, j’ai pu apprécier ses arômes incroyables accentués par la puissance accrue. Une vraie réussite. Je n’ai pu quitter le stand sans une bouteille.
La Part des Anges – Eclips’ – 68%
Une nouveauté était aussi présentée sur le stand, un blanc à plus haut degré reposé trois ans en amphore. Il nous amène un peu sur ce que l’on connaît davantage en rhums agricoles (on perd en partie la typicité de la distillerie). Sa force réside sur la bouche, très droite, qui suit son axe sans en dévier. Une explosion contrôlée associée à grosse sucrosité et un alcool bien dosé. La finale mériterait d’être plus longue.
Si vous y faites une halte, ne passez pas à côté de leurs eaux-de-vie de fruits et de leurs mistelles, ils y a des choses exceptionnelles !
Les rhums de Polynésie Française : Manutea, T Rhum, Mana’o et Tamure
Un autre passage obligé au Salon de l’Agriculture sont les rhums de Polynésie Française. Et cette année, ils avaient eu pour riche idée de se regrouper au même endroit, ce qui fut drôlement pratique !
C’est donc chez Manutea que je me suis arrêté en premier. Passage sur les classiques : le 40% toujours réglissé/anisé et le 50%, plus organique et gras, qui fonctionne décidément très bien.

Manutea Bio – 55%
Je ne pus manquer de faire le parallèle avec le Bielle Bio, en effet, ce Manutea est également très porté sur les légumes (et la terre). Cependant, la texture est belle, très grasse et on y retrouve l’anis, en plus de la canne. Une impression assez différente de ma première dégustation au Salon Club Expert 2021.
Manueta Quintessence – 59.9%
Je connaissais déjà ce rhum, que j’avais eu la chance de déguster au Salon Dugas 2022. Sur celui-ci, mon opinion n’a pas changé, il est succulent. Une sorte de synthèse entre le 40% et le 50% mais avec plus d’intensité, autant au nez qu’en bouche. Fraicheur anisée, gras, sucrosité, vivacité. Superbe !

Chez T Rhum (parfois appelé Taha’a du nom de l’île sur laquelle la distillerie se trouve, ou encore Pari Pari qui est le nom du domaine qui l’abrite), pas de réelle nouveauté, ce qui ne m’a pas empêché de tout (re)goûter. Le 40% qui est déjà très expressif mais un peu trop végétal/floral à mon goût. Le Rhum T 55% toujours aussi réussi et atypique (quand on le compare aux rhums des Antilles) avec sa canne organique et une grosse sucrosité. Les 62% et double distillation 74% m’ont moins convaincu, même si l’un comme l’autre offrent une très belle et agréable explosion en bouche.

L’arrêt chez Mana’o fut de courte durée. Juste deux références, le classique, sur lequel j’ai fait l’impasse, et le Rangiroa (qui devrait être le 3ème batch), déjà dégusté au Rhum Fest 2022. C’est décidément un très beau rhum, dominé par la canne mâtinée d’un léger air marin. La texture se remarque, ainsi que la suavité.
Dernier arrêt polynésien chez Tamure.
Plus ancienne distillerie de Polynésie, c’est pourtant la dernière dont j’ai dégusté les produits. Avant de passer à leur nouveauté, j’ai souhaité repasser par le classique blanc à 56%. Il possède un profil différent des autres rhums de la région ; il offre moins de fraicheur mais la canne est bien là, douce, comme enrobée et à la sucrosité massive.

Tamure La Danse de l’Ours – 80,4%
Il s’agit de la troisième cuvée de la chaine YouTube, le Bar de l’Ours. Comme vous pouvez vous en douter au degré affiché, nous sommes sur un brut de colonne. Il aura reposé entre 18 et 24 mois.
Au nez, l’alcool est relativement discret (pour le pourcentage alcoolique). Il se présente entre canne fruitée et florale pour un rhum au nez très expressif. La puissance (quand même bien marquée) et la douceur s’associent bien en bouche, la fraicheur en prime.
Terre du Sud – Nouvelle-Calédonie

Quand j’ai appris qu’il était possible de déguster les rhums de cette distillerie, je m’y suis précipité. Trois références étaient à découvrir. D’abord le Terre du Sud classique à 45% qui est un assemblage de 4 cannes différentes. Il est dominé par la canne et la fraicheur. Joli. Le monovariétal Canne Verte, lui embouteillé à 55%, est naturellement plus pêchu mais pas plus expressif pour autant. À noter sa texture soyeuse et veloutée. Et pour finir la Canne Tharet, un autre rhum dont le vesou provient d’une seule variété de canne. Également à 45%, son nez est très expressif et l’impression en bouche est ronde. Il manque un peu de puissance et de longueur mais son identité est vraiment intéressante.
Retour chez Bielle pour finir, afin de m’y frotter à quelques vieux (cette phrase sonne bizarrement, je l’admets).

Bielle vieux – 41%
Trois ans, déjà un joli vieux où on garde un peu de fraîcheur mais où le bois domine, gourmand.
Bielle 2011 (10 ans) – 45% et le 2018 Goélette brut de fût (premium)
Les deux sont super gourmands, au boisé épicé extrêmement plaisant. Le brut de fût a ce kick supplémentaire qui lui donne ma préférence. Excellent.
Bielle 2014 brut de fût – 56.5%
L’alcool se fait plus présent mais c’est par ailleurs celui où, selon moi, on retrouve le plus ce qui fait l’identité Bielle. Toujours aussi bons ces bruts de fût de la distillerie marie-galantaise.
Et voilà pour cette petite visite orientée rhum du Salon de l’Agriculture. Je vous ai épargné mes dégustations d’andouille, le délicieux sorbet coco, un verre de jus de canne fraichement pressé et les tapes sur les culs des bœufs d’une tonne et demie ! 😉

Concours Général Agricole et Salon de l’Agriculture 2015
Concours Général Agricole et Salon de l’Agriculture 2016
Concours Général Agricole et Salon de l’Agriculture 2020 – partie 1
Concours Général Agricole et Salon de l’Agriculture 2020 – partie 2
Super retour, ça donne envie d’en acheter encore et encore …
Ps : Petite coquille sur la danse de L’ours, pas le bar de L’ours 😆
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Salut amoureux du rhum !
Je ne suis pas sûr de voir de quelle coquille tu parles. La Cuvée est appelée “La danse de l’Ours” et le nom de la chaine YouTube est “Le Bar de L’ours”.
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