Les blancs purs jus de canne, c’est fait !
C’est à ce moment-là que je me suis vraiment rendu compte que je n’aurai jamais le temps de tout déguster : trop de nouvelles marques et trop de nouveautés, que ce soient chez les embouteilleurs officiels ou les embouteilleurs indépendants.
Heureusement, la solution à ce “problème” (oui il y a de pires problèmes dans la vie que d’avoir trop de rhums à déguster, je vous l’accorde :D) était juste sous mon nez : Le Bar des Nouveautés !

Bon là le salon venait juste d’ouvrir ^^
J’en profite pour vous parler de l’organisation du Rhum Fest de cette année. En 2016 il y avait déjà un Bar des Nouveautés, qui était placé dans la partie VIP du salon. C’est cette dernière qui avait cristallisé le plus de critiques ; cette zone VIP était très peuplée et le bar, pris d’assaut. Si on ajoute le nombre élevé de visiteurs et un couac sur l’heure d’entrée, on peut comprendre que certaines personnes aient moins apprécié leur visite que les années précédentes. C’est entre autres grâce à leurs retours nourris (et parfois fleuris) que les organisateurs ont pu, cette année, rectifier et améliorer les éléments cités. Résultat des courses : exit l’espace VIP (mais un Bar des Nouveautés toujours présent et je vais y revenir), un nombre moindre de visiteurs (et donc un prix d’entrée naturellement un peu supérieur) et une ouverture des portes à l’heure prévue. Bref, pas loin d’un sans-faute et c’est sans parler du nombre impressionnant d’exposants et d’activités proposées !
Mais revenons-en à nos moutons, avec ce choix impressionnant de choses à déguster, concentrées sur un tout petit périmètre. Après Vincent et Benoit l’année dernière, nous avons Marc et Alexandre qui nous accueillent et nous conseillent derrière le comptoir. Il y en a pour tous les goûts (même les très mauvais :P) ; certaines bouteilles qui me font de l’œil et d’autres qui aiguisent ma curiosité déplacée. A noter le contraste avec l’année précédente en termes d’affluence sur ce stand ; conclusion : facile de se faire servir 🙂
Certains retours de dégustation risquent d’être un peu courts, car certains de ces rhums ne méritent pas franchement plus.

Une belle maison de Martinique malgré tout.
Commençons par les agricoles, dont deux que je voulais absolument goûter chez Depaz, après la claque du 2002.
Le Hors d’Âge finition porto pour débuter. Au nez c’est fruité et gourmand mais relativement simple, malgré la touche de poudre à canon. La bouche est plus sèche que prévue et la finale est dans la même veine, avec une légère astringence en prime. En un mot : déception.
Bon avec un peu de chance le 2003 – l’autre nouveauté de la maison – sera dans la lignée du 2002. Au nez ça ne se présente pas mal avec plus de complexité et de vivacité que le Hors d’Âge, ainsi qu’un équilibre assez réussi entre fruits et épices (et un boisé moins présent). Il est explosif et prend bien la bouche. Lui aussi est sec et le boisé ressort. Il prend encore de l’ampleur sur la finale et un côté tannique apparait. Pas mal du tout dans l’ensemble, mais pas un coup de cœur non plus.

Un gars à l’humour douteux se cache sur cette photo, saurez-vous le trouver ?
On reste en Martinique avec Trois Rivières et un élevé sous bois vieilli en fût de whisky. Bon, il faut que je vous avoue ma grande passion pour les élevé sous bois… ou pas. Du coup, dur d’évaluer celui-ci. Le nez n’a, pour moi, qu’un intérêt très très minime et alors que la bouche est un peu mieux, la finale replonge. J’ai bien conscience que cette “note de dégustation” n’est pas trépidante, mais il ne m’a rien inspiré de plus.

C’est bien bon et, contrairement à certaines personnes, je ne lui ai pas trouvé de côté vineux dérangeant.
Ultime rhum de l’île aux fleurs présent au Bar des Nouveautés, avec la dernière finition de HSE : Château Marquis de Terme (grand vin rouge de Bordeaux). Au nez il est hyper gourmand, riche et sec à la fois. La suite de la dégustation est du même acabit avec un boisé vraiment gourmand qui vous accompagne sur la longueur. Je n’ai étrangement pas écrit tellement plus, mais l’impression qu’il m’a laissée est très positive. Pour la petite histoire, je l’ai dégusté à l’aveugle lors des phases finales des Rhum Fest awards, et si je me rappelle bien, c’est (de tous les rhums de toutes les catégories) celui auquel j’ai attribué la meilleure note. Pour moi, sans doute la meilleure des finitions du monde par HSE !

Intéressant changement de cap avec ces degrés d’embouteillage qui commencent à s’élever.
On change de registre avec l’embouteilleur indépendant Mezan, connu depuis quelques années pour proposer des rhums de différentes provenances, toujours réduits à 40% ; ce qui parfois nous donne diablement envie d’avoir un peu plus de puissance afin d’avoir plus de vivacité et des arômes plus concentrés. Et bien, ils ont exaucé nos souhaits avec leurs premiers embouteillages à 46%, une petite révolution dans le landerneau Mezanien. Un Trinidad 2007 tout d’abord (pas Caroni), qui n’est pas franchement remarquable. Il faut l’avouer, les rhums de chez Angustura sont rarement passionnants à mon palais ; celui-ci ne déroge pas à la règle et je m’en passerai donc volontiers. Le second de ces rhums un peu plus puissant nous vient de la Jamaïque, c’est un Worthy Park de 2005 pour être précis. Au nez, pas de doute sur le pays d’où il est issu. Nous sommes ici sur un jamaïcain végétal où le solvant n’est qu’à l’arrière-plan et où la banane, elle, se fait une belle place. La bouche est puissante et nous offre une rapide transition vers des arômes empyreumatiques, qui nous accompagneront jusqu’à la fin (de la dégustation, pas la fin du monde, faut pas déconner non plus). Pas mal que ce WP, mais rien de vraiment nouveau non plus.

Je lui préfère, pour un prix vraisemblablement bien inférieur, le XO.
Nous restons dans les anciennes colonies anglaises et passons à la Barbade et la vénérable maison Mount Gay. Nouveau rhum haut-de-gamme de la marque, le 1703 Master Select. Que nous cache ce nom aguicheur ? Au nez, nous sommes sur les marqueurs de l’île mais avec plus de rondeur et la bouche est exactement dans cet esprit avec une certaine onctuosité. La finale est longue et évolutive, avec cette même onctuosité, un profil chaud et un boisé présent. Mais les secondes défilant, il devient de plus en plus sec. Bon… Ce n’est pas trop mal mais cela ne vaut sans doute pas son prix (que j’imagine élevé).

Richland Rum et Bayou Rum, tous les deux du sud des Etats-Unis.
Soyons un peu plus aventureux ! Partons aux Etats-Unis ! Deux rhums américains étaient présentés. La Géorgie d’abord avec le rhum Richland. Un nez fort engageant sur des notes de mélasse, de caramel acide et de… vomis. Marc m’avait mis en garde, mais je me suis sacrifié pour la science (le seul autre retour sur ce rhum était plutôt positif, donc je me méfie de mon propre avis sur ce coup ^^). Heureusement la bouche est bien différente avec ses arômes de fumée, de sucre brun, de tabac et de bois. Il garde une légère acidité et l’alcool n’est pas très bien intégré. La finale n’est pas désagréable, sur le tabac, des notes fumées et la vanille. Pas top.
Rendons-nous en Louisiane maintenant avec la marque Bayou. J’ai fait l’impasse sur le spiced et me suis donc dirigé vers le Select, qui est un trois ans. Et ben ce n’est pas dégueu, avec un profil marqué fût américain au boisé sec et gourmand. Après une rapide recherche sur internet, il semble se trouver pour 35$, ce qui semble décent.

Les mots me manquent
Comment ça, les Etats-Unis ce n’est pas assez exotique ?! Vous voulez de l’exotique ? Vous allez être servis ! Oui, décidément je vis dangereusement…
Départ pour l’Inde, ses temples, son milliard d’habitants, ses éléphants, ses castes et son rhum en peau de tigre Pas moyen de ne pas voir cette bouteille recouverte de (fausse) peau de tigre, orange pour le Special Reserve et rouge pour le Spiced (pas moyen de l’oublier non plus :x). Si on devait prendre une bouteille de rhum comme exemple du mot “kitsch”, on aurait le candidat parfait. Ah oui, et puis, je ne vous ai pas dit, mais il arbore également une (fausse) dent de tigre en collier. Les apparences peuvent être trompeuses, alors on ne s’arrête pas au contenant et on se penche sur le contenu.
Donc, oui à tous ceux qui avaient essayé de me dissuader, vous aviez raison ; ce n’est pas bon. Je ne connais rien sur le processus de fabrication de ce rhum, mais je pense qu’il pourrait à nouveau être pris comme exemple, cette fois-ci pour illustrer les rhums élaborés à partir d’un alcool neutre auquel est ajouté des arômes et du sucre pour obtenir un produit buvable (oui je suis plein de préjugés). Ici, on a un rhum très sucré aux notes de caramel et de vanille. Voilà, voilà…
Comme rien ne m’arrête, j’ai voulu goûter le spiced – juste après avoir écrit mon testament ! Eh bien, il est moins mauvais que le “nature” (nature, si je puis dire :/). Moins sucré et sur les épices, mais là c’est normal. Bon c’est loin d’être le meilleur rhum épicé que j’ai pu déguster, mais au moins, on a à peu près un produit qui correspond à nos attentes.

Le liquide est un peu foncé ? Oui.
On reste en Asie et l’on s’envole aux Philippines pour essayer la nouveauté de chez Don Papa. Là je dois vous avouer : j’étais très remonté avant même d’y tremper les lèvres. Je m’explique : en chemin pour le Rhum Fest, je parcourais les réseaux sociaux, à la recherche des premiers retours sur le salon et apprends l’existence de cette bouteille, appelée Rare Cask. Les avis étaient plutôt positifs : “Ah là, c’est vraiment du rhum”, “Il n’a rien à voir avec les autres bouteilles de la marque”, “Les arômes paraissent naturels”, “Les quelques degrés en plus lui vont bien”, “Vraiment étonnant et surprenant”… Rétrospectivement, je me rends compte ce sont bien plus des critiques des deux liqueurs de la marque, plutôt que des louanges sur cette nouveauté.
Bref, il était temps de me faire ma propre opinion. Au nez, ma première impression était celle d’un alcool neutre auquel on aurait rajouté des trucs, surtout du caramel et de la vanille. Cependant, d’autres arômes sont à noter : orange, fruits à coque et cacao. Rien qui ne paraisse chimique (contrairement aux deux autres références chez Don Papa). L’alcool se fait sentir et l’ensemble n’est pas très équilibré. En bouche c’est un peu mieux avec une impression chaleureuse et torréfiée. Il est relativement pêchu. La finale est dans la même veine avec en plus un léger côté menthol. Pas si mal dans l’ensemble mais surtout comparativement à ce à quoi ils nous ont habitué. Pour résumer, voilà la phrase que j’ai prononcé à plusieurs reprises après cette dégustation : “Si on te donne à manger de la merde pendant des semaines, tu es super content de recevoir un bout de pain rassis.” A posteriori, je remplacerais sans doute le terme “pain rassis” par “baguette industrielle”. Pour ce qui est du prix, pour l’instant on ne sait pas mais on peut s’attendre à ce qu’il soit trop élevé

Je n’ai en revanche pas eu l’occasion de goûter au Forsyths 2006 (merci Alex pour la photo !)
Histoire de finir sur une note plus positive, un mot sur Velier et son Habitation. Tout d’abord – et ce n’est pas vraiment plus joyeux – je n’ai pas eu la chance de goûter aux prochains Caronis à sortir, les bouteilles s’étant vidées trop rapidement 😦 En revanche j’ai pu déguster deux des trois “nouveaux” jamaïcains ; les nouveaux batchs des deux blancs de cette île. Toujours autant d’intensité, de richesse des arômes mais une différence majeure : on ne sent pas l’alcool, que ce soit la version à 57% ou celle à 75.5%. Je n’arrive pas à me l’expliquer et du coup, je me dis que c’est peut-être mon palais qui n’était plus en état, donc si vous avez partagé cette impression (ou pas), n’hésitez pas à m’en faire part 🙂
C’est tout (et c’est déjà beaucoup) pour aujourd’hui !
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