Et voilà, il est enfin temps de vous parler du dernier salon de mon marathon de la rentrée. Je vous emmène en Belgique, dans la région la plus humide du pays, plus précisément à Spa, capitale intersidérale du Rhum !
J’y étais déjà allé l’année dernière (vous pouvez retrouver les articles à ce sujet ici et là) et j’avais vraiment passé un bon moment, d’où mon désir d’y retourner cette année. Je n’ai pas regretté une seconde !
L’année dernière, vous vous en rappelez peut-être, le voyage pour se rendre à Spa a tout eu d’une épopée, avec trois trains et presque six heures de trajet. Cette année a été bien différente, grâce à la générosité et à l’accueil d’un confrère de rhum : Jean-François. Liégeois de son état, il a proposé de m’héberger sur la durée du salon et j’ai volontiers accepté de venir passer la nuit du vendre au samedi chez lui (préférant passer la nuit du samedi au dimanche à Spa même, pour ne pas louper la soirée sur place).
Bref, deux heures de train, arrivée à Liège, réception à la gare, petit trajet en voiture, apéro bien sympa, meilleure bière du monde (et ses petites sœurs), vin de liège – et ouais ça existe, lasagnes maison, lacquemants, Port Mourant Samaroli 2003, Calvados par Twelve, Caroni 1996 Single Cask Cremaschi, Jacuzzi dans le jardin, détente, bonnes rigolades et excellente nuit ! Franchement, je n’aurais pu imaginer mieux pour débuter ce week-end belge ! Encore merci !

Mes plaisirs liégeois en quelques photos 🙂
Après une bonne douche et le petit déjeuner, nous sommes rejoints par deux autres bien sympathiques amateurs, Benoît et Éric. C’est avec ces deux énergumènes que nous avons fait la route jusqu’à Spa non sans faire deux arrêts en chemin : l’un pour faire le plein d’échantillons vides dans une boutique improbable et l’autre chez Hubert Corman. Je tenais à y faire une escale afin de rencontrer le maître des lieux et de pouvoir découvrir sa cave, aussi riche en spiritueux, qu’en bières et qu’en vins. Ce n’est qu’après une dégustation atypique d’un très vieux brandy espagnole, que nous avons repris la route pour notre dernière étape, agrémenté, dans la voiture, d’un Caroni de chez Cadenhead 😀
Arrivée à Spa, on choppe les clefs de mon Airbnb, on déjeune d’excellentes frites (et d’un croc-poulet sauce poivre), on trouve une place pour se garer et on marche les quelques mètres qui nous séparent du centre culturel de Spa où a lieu le salon du rhum belge.
C’est parti !

Le Salon du Rhum Belge à Spa – Et toujours ce lieu d’exception
Alors que je fais la queue pour récupérer mon entrée, je tombe sur Vincent – l’organisateur du salon – que je remercie pour l’invitation et que je félicite. Pour le salon bien sûr mais surtout parce qu’il était devenu une nouvelle fois papa… la veille ! Dire qu’il n’a pas beaucoup dormi sur ces quelques jours et un doux euphémisme 🙂
Et là, comme souvent lors de ces salons, je commence par faire le tour du propriétaire afin de voir ce qui m’attend ; le cœur du salon en lui-même avec ses dizaines d’exposants, l’espace collector – où j’avais passé tant de temps l’année dernière – et le théâtre où se déroulent les masterclass (je vous passe le vestiaire et les toilettes, malgré leur importance majeure :P). Je retrouve, avec joie, mes repaires de l’année dernière.
Mais ce n’est pas la seule chose que je retrouve. En effet, je tombe sur bon nombre de connaissances ; salut la Légion, salut la 2.0 et salut à tous les autres !

Mon premier rhum du salon pour commencer en finesse – English Harbor 1981
Et là se pose la question habituelle : par quoi commencer ? Je ne sais plus pourquoi, mais j’ai jeté mon dévolu sur un rhum de l’espace collector, le English Harbor 1981, rhum que j’avais dégusté quelques années en arrière au Rhum Fest (en compagnie de l’homme au chapeau, Marc ;)) et qui m’avait alors beaucoup plu. Je voulais donc voir, des années plus tard, s’il était toujours à mon goût.
Au nez, il propose un côté huileux et un profil fin dominé par les fruits à coque et la vanille. Un peu “lourd”, il manque de fraicheur. En bouche, en revanche, il a plus de pèche et aussi plus d’équilibre. Des arômes de fruits secs, de fruits à coque, un boisé fin, de la vanille et tout simplement de la gourmandise. Sur la finale on retrouve les mêmes marqueurs mais en plus chauds, plus grillés et avec une présence du bois un peu plus marquée. Autrement dit, il me plait toujours ce “petit rhum” 🙂
Après cette mise en bouche, j’ai entamé mon tour des nouveautés présentées sur le salon, plus certains rhums pas si nouveaux que ça mais que je n’avais pas forcément encore eu l’occasion de déguster.

Clément Canne Bleue 2016
Vous me connaissez, on débute par les blancs ; cette fois-ci avec le Clément Canne Bleue 2016. Un nez sur la canne et les fleurs. Il est sec, assez frais et pas très gourmand. En bouche, il l’est un peu plus avec une canne plus présente alors que l’alcool se fait sentir. La finale est longue sur une canne qui redevient végétale et toujours des notes florales.
Une bouche agréable mais une impression globale moyenne.
J’ai ensuite voulu retremper les lèvres dans le Neisson 52.5%, que je n’avais pas goûté depuis bien longtemps. Et bien, je ne peux que confirmer tout le bien que les gens pensent de lui. Il est fin et intense à la fois, avec sa canne à sucre, des agrumes, sa touche de poivre… Très sec et très long… Vraiment sympa, même si pas de la veine gourmande.

Longueteau Prélude – les pailles nouvelle génération
Après les blancs, un paille. Pour faire simple, je n’aime pas les rhums élevés sous bois. Je ne leur trouve rien de très intéressant, une sorte de batard, coincé le cul entre deux chaises. Mais voilà, certaines distilleries commencent à passer plus de temps et d’énergie à aborder différemment et à essayer de renouveler cette catégorie. Neisson et son Profil 105 représentent sans doute le début d’un renouveau.
Longueteau suit cet exemple avec un rhum paille à sortir, le Prélude. Ce Canne Rouge est vieilli 18 mois en fûts neuf et est réduit à 45%. Avant que je ne le goûte, je pensais me trouver face à un rhum au profil canne fraiche au nez, puis plus boisé sur la bouche et la finale. Eh bien, vous savez quoi ? J’avais complètement tort (aussi incroyable que cela puisse paraitre :D). C’est précisément au nez que le bois se fait sentir, mais l’on a aussi cette caractéristique “élevé sous bois” qui n’est pas mon truc. Puis en bouche et encore plus sur la finale, c’est le jus de canne qui l’emporte, cependant avec un côté un peu plus rond et une texture un peu plus “épaisse”.
Une expérience intéressante pour rhum paille qui se démarque, en bien.

Neisson 2012 pour le salon de Spa
On revient chez Neisson avec une édition spéciale Spa, un rhum vieux de 2012 en brut de fût. Un vieux millésimé, de chez Neisson, en quantité très limité pour un événement comme le salon de Spa, dans une carafe type anciens 1991, 1992 et 1993, il y a de quoi être intrigué.
Au nez, nous sommes face à une réussite ! Des arômes de fruits à coque et de fruits secs mais aussi de la noix de coco et une orange qui surgit après quelques minutes, ça c’est pour les fruits, mais le boisé n’est pas en reste avec des notes fraiches et fines et même un peu de sciure de bois. Alors oui, l’ensemble n’est pas peut-être pas très fondu, mais c’est déjà drôlement agréable. En bouche les fruits disparaissent et ce sont le bois et les épices qui dominent, y compris une touche de poivre. L’alcool est parfait. La finale, d’une belle longueur est fine et fraiche, alors que le boisé épicé se fait vanillé.
Un très bon rhum vieux en somme !
J’ai voulu me faire ensuite, un embouteilleur indépendant français, désormais bien connu : Compagnie des Indes (je vous en parlais déjà ici et là). A chaque année son lot de single casks, et j’avais vu, lors de mes repérages, cinq de ces single casks (fût unique) plus un nouveau Boulet de Canon (série où Florent Beuchet travail la notion de “fumé”).

Rum Grander du Panama
Mais, en arrivant sur son stand, et après les salutations d’usage, il me demande si je connais le rhum Grander, qui est un rhum du Panama sans additifs à 45%, qu’il distribue en France. J’avais déjà vu passer quelques photos de la bouteille, la marque étant très active sur Instagram.
Eh bien, il n’est pas mauvais, sur des notes de vanille, de bois et de coco au nez, et un profil sec. La bouche est également sèche sur des arômes similaires, mais avec un petit quelque chose en plus que je n’ai su identifier 😡 Sur la finale on garde le duo boisé et vanillé.
Un rhum qui est susceptible de ramener des brebis égarées de par les contrées sucrées et sirupeuses, vers le droit chemin du rhum non édulcoré.

La nouvelle gamme Compagnie des Indes (dont celui tout à gauche, le New Yarmouth 2012 !)
Bon, et maintenant, on attaque Compagnie des Indes.
Un Diamond 14 ans, qui a un profil type de Diamond au vieillissement continental, avec un boisé inexistant et une fraicheur végétale et fruitée (pomme et pèche). L’alcool est discret et en bouche entrent en scène des notes empyreumatiques qui ne feront que prendre en puissance sur la finale. Pas mal mais rien de neuf.
Direction la République dominicaine avec un 13 ans à 45%. Au nez, on a des arômes fumés et vanillés, ainsi qu’un léger menthol en fond. Après de courtes minutes, les notes fumées diminuent et apparait un fruité gourmand sur l’abricot à tendance huileuse (ouais je sais, c’est étrnage, mais c’est ce qui m’est venu :P). En bouche on a un profil de rhum léger sur la vanille, la fraicheur, de timides fruits à coque et un certain manque de corps. En finale, la note fumée resurgit et vient concurrencer la vanille.
Je ne connaissais pas de rhum de cette île avec un tel profil, intéressant.
On continue avec Cuba et un 18 ans de chez Sancti Spiritus. Ce qui m’a surpris d’emblée c’est son profil pot still avec ses esters, son côté lacté acide, mais aussi une timide poudre à canon et une note fumée qui ressort après quelques minutes. De plus il n’est pas dénué d’une certaine fraicheur végétale. On retrouve en bouche les mêmes arômes mais avec un boisé qui se fait légèrement soufré. Il devient de plus en plus sec et s’oriente vers une association empyreumatique et végétale. La finale est longue sur son côté brûlé/fumé mais aux accents médicinaux.
Voilà un rhum un peu ovni, franchement atypique (de ce que je connais de Cuba) et qui vaut le détour.
On reste dans les rons (même si on voit bien que la différenciation par origine ne donne que très peu d’indication sur ce qu’il y a dans la bouteille), cette fois-ci avec un rhum du Panama mais brut de fût (60.9%) de 9 ans. Au nez, l’alcool est présent mais une relative douceur surnage, alors qu’une surprenante fumée (décidément) est marquée. En bouche, il y a un petit peu de sucre et ce sont des arômes boisés, épicés et caramélisés qui se distinguent. La finale est moyennement longue, avec ce léger voile de fumée et une impression alcooleuse qui demeure.
Pas un rhum immanquable mais qui propose une image différente du Panama, et rien que pour ça c’est intéressant.

Florent Beuchet, créateur de la marque Compagnie des Indes, qui fatigue un peu 😉
Dernier single cask avec la Jamaïque et la distillerie New Yarmouth, méconnue c’est quand même là qu’est fait le Wray & Nephew, ce qui est tout de même une bonne corde à leur arc. Ici Florent nous propose un 12 ans réduit à 55%. Au nez, OMG ! Nous sommes tombés sur la définition même du Jamaican Funk ! Des fruits en pagaille, tantôt sur-mûris et acides, tantôt verts. Mais aussi pas mal de notes végétales (y compris de la sève de pin), un beurré léger, un solvant discret… Un très beau jamaïcain jusque-là. En bouche, la même chose avec un côté astringent/acidulé sympa, des notes empyreumatiques qui apparaissent et une puissance mesurée, la réduction à 55% est bien choisie. La finale est longue, sèche et dominée par des notes brûlées et fumées.
Pfiou, quel voyage ! Mon coup de cœur du salon !
Dur de passer après ça, donc autant partir vers la “fantaisie” 🙂 Elle sera personnifiée par le Boulet de Canon n°5, dont la particularité vient des fûts dans lesquels sera mis à vieillir le rhum. Ceux-ci passent par les fumoirs où sont fumés les saucisses de Morteau et autres jambons du Jura ; autant vous dire que les fûts sont hyper marqués et que cela s’en ressent sur le rhum. Au nez, la fumée frappe, elle est un peu acide avec un franc côté charcuterie et cheminée. Des notes herbacées et résineuses sont aussi de la partie et permettent de ne pas avoir un rhum monolithique. En bouche, il est très cendres, toujours avec l’acidité trouvée au nez. La finale est extrêmement longue, et l’on y retrouve la charcuterie fumée et la cendre de cheminée.
Atypique, oui, déséquilibré, non, en tout cas qui s’inscrit bien dans cette gamme des Boulet de Canon 🙂 Et comme dirait l’autre : “Ca sent quand même bien le saucisson”. 😀
Et bien cette fournée de Compagnie des Indes est intéressante à plus d’un titre, jolie sélection. Et ce jamaïcain !

Une fin de soirée tout en détente avec, dans le fond, un amateur de thé qui était venu avec son service 😀
Pour nous remettre de nos émotions de ce samedi bien chargé, voici en quelques mots, ce à quoi a ressemblé ma soirée : une lampée de John Connu au goulot, un resto de burgers copieux (même si en manque de viande :D), une excellente bière absolument pas belge et bien sûr, le tout en excellente compagnie de joyeux lurons ! 🙂
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