Un autre événement rhum – et non des moindres – s’est achevé. Le millésime 2019 du Whisky Live fut bon, certains diront même exceptionnel et d’autres seront restés sur leur faim avec les nouveautés proposées. Et moi ? J’ai passé du bon temps et finalement c’est sans doute ce qui importe le plus : rencontrer des producteurs, déguster leurs rhums (et autres spiritueux), évoluer dans un espace vaste et bien pensé, et bien sûr – mais vous connaissez le refrain – retrouver bon nombre d’amis avec lesquels boire des cocktails préparés de main de maître à la Cocktail Street. Vraiment pas de quoi se plaindre (même si je vais bien trouver un ou deux trucs à critiquer 😉).

Whisky Live 2019 – Les verres
Cette année, le Whisky Live avait pris ses quartiers à la Grande Halle de la Villette. Bon point : l’espace. Mauvais point : c’est à une heure de chez moi en métro ! 😛 Comment ça tout le monde s’en fout ? Plus sérieusement, ce fut un des salons les plus spacieux qu’il m’ait été donné de faire, ce qui est vraiment agréable. L’espace principal abritait tout ce qui n’était pas rhum et un bâtiment plus petit regroupait tous les stands d’eau-de-vie de canne. C’est également dans l’immense grande halle que la boutique et l’espace VIP avaient élu domicile.
J’ai pu m’y rendre deux jours, ce qui n’est pas de trop, même lorsque l’on se concentre uniquement sur le rhum (ce qui n’a d’ailleurs pas tout à fait été mon cas), le samedi et le lundi.

Whisky Live 2019 – Chichibu ? Chichibu ? Chichibu ! Chichibu !
Muni de mon pass VIP, je me retrouvais samedi midi à faire la queue avec les autres nombreux privilégiés qui pourraient investir les lieux une heure avant les indigents :P. Pas mal de monde déjà, y compris – je m’en rendrai compte un peu plus tard – pas mal de personnes qui veulent accéder à la boutique le plus vite possible. Pourquoi cet engouement ? Du fait de la présence de certaines bouteilles qui seront bien vite écoulées et ardemment recherchées par les collectionneurs. Il n’y avait qu’à voir la course de certains sprinteurs de fortune dans les escaliers menant au shop éphémère pour réaliser qu’il y avait de l’argent à se faire. Je les ai laissés à leur vénalité et suis rapidement allé du côté des rhums pour me retrouver dans un bâtiment pour l’heure boudé par les festivaliers ; ce qui a bien fait mon affaire !
J’ai pu me retrouver seul chez Neisson pendant une bonne vingtaine de minutes à déguster et papoter avec Gregory, Alex et Julie. C’est donc en Martinique, chez Neisson que mes nombreuses dégustations ont débuté, évidemment par du blanc.

Whisky Live 2019 – Neisson blanc
Et pas n’importe lequel puisque c’est le classique 52.5 qui a ouvert la danse. Toujours agréable, avec un peu plus de poivre et de notes végétales que dans mon souvenir, pour finir par une finale longue et fraiche.
On reste sur du 52.5 mais bio cette fois avec la récolte 2018. Sur la version précédente, j’avais été impressionné par le nez – proche de ma perfection – mais déçu par la bouche aux accents terreux trop prononcés. Je ne vous fais pas poiroter : sa bouche est exempte de notes désagréables. Nous avons donc, dès le nez un rhum plus riche, plus fruité et plus profond que sur la version non bio. On “sent” presque le sucre. Il se fait aussi frais et végétal. La bouche est encore plus fraiche avec un citron vert ravageur. On ne s’égare pas non plus sur ce rhum, qui est sec et droit. C’est super bon, j’ai pris une bouteille ! Premier coup de cœur du salon.

Whisky Live 2019 – Bally blanc
Bally n’était pas bien loin et j’ai réalisé que ça faisait bien longtemps que je n’avais trempé les lèvres dans leur blanc 50. Et bien, ce fût une relativement bonne surprise. Moins fin et complexe que les Neisson, il procure cependant un vrai plaisir en bouche (titre !).

Whisky Live 2019 – Longueteau parcellaires
Et puis quelques mètres plus loin, Longueteau ; quoi de mieux pour continuer sur les agricoles blancs ? Un Parcelle 9 d’abord (récolte 2018), que j’ai trouvé meilleur que celui que j’ai à la maison (dont je ne me rappelle plus l’année là tout de suite mais je regarderai, et ça vous fera une belle jambe :P), surtout en bouche. Puis un Parcelle 12 ensuite, plus gourmand et moins végétal que dans mon souvenir (même si cette facette plus verte m’a semblé surgir du verre après un peu de repos). Je dois avouer être un peu moins emballé par les parcellaires Longueteau qu’à leur sortie (pour la 1 et la 9) il y a maintenant quelques années de cela. Sont-elles vraiment moins bonnes ou me suis-je habitué à ce profil ? N’hésitez pas à me dire ce que vous en pensez.

Whisky Live 2019 – Clarins
D’autres blancs pur jus que je comptais bien découvrir étaient les nouveaux batchs de clairin ! Plus besoin de présenter ces alcools de canne d’Haïti que Velier nous propose depuis maintenant 6 ans, si ma mémoire est bonne. Si vous vous intéressés aux clairins, vous savez également les profils qui peuvent varier sensiblement d’une année à l’autre. Alors voyons voir ce que les « millésime » 2018 nous réservent. Le Sajous, qui est assez souvent le clairin le plus proche des rhums pur jus que l’on connait, s’en éloigne assez franchement cette fois-ci. Un nez expressif, acide et gras à la fois sur la canne organique, l’anis, une truffe discrète et de légères notes fumées. La bouche est étonnamment équilibrée et plus douce que prévue, même l’alcool semble bien intégré. Une bonne fournée ! Le Vaval est le clairin, qui dans mon esprit fait la passerelle entre les deux autres. Cette année, pas vraiment ; son nez est lui aussi organique mais plus épicé et poivré, alors qu’en bouche l’alcool est un peu plus présent. Pas exceptionnel. Le Casimir, enfin, l’OVNI parmi les OVNI – beaucoup ont encore en tête la version 2014, une sorte de truffe liquide au litchi pourri ! A peine ai-je mis le nez dans la 2018 que j’ai su que nous étions sur une autre grande année pour le clairin Casimir : très intense et expressif avec de la truffe et des arômes fumés, mais surtout un côté fermier à décorner les bœufs (haha). J’aime beaucoup ce genre d’arômes, assez rares dans le rhum, ces arômes qui nous donnent l’impression d’avoir le nez dans le cul d’une vache ! En bouche, il se fait moins fou mais plus gourmand et développe même une légère sucrosité. Mon second coup de cœur du salon.
Pour être complet sur les quelques blancs dégustés, je dois ajouter un étrange sample du Providence, nouvelle distillerie ouverte à Port au Prince par Velier. Il s’agissait en fait d’un « blend » de différentes tentatives réalisées jusqu’à présent, le tout à plus de 75% si ma mémoire est bonne. Je m’attendais à quelque chose d’expressif au possible dans la lignée des clairins… pas du tout. Le premier arôme qui m’a sauté aux narines a été le caramel :s Un distillat un peu plat et sans trop d’intérêt à mon palais du moment. J’espère que ce mix d’essais aura permis d’atteindre un résultat avec plus d’identité, éloigné de ce que j’ai pu me mettre sans la langue.

Whisky Live 2019 – Neisson Profil 105
Allez, temps de se tourner vers les vieux (et les vieilles, faut bien qu’un jour ils payent – pardon je me suis laissé emporter), tout en restant sur les agricoles, avec à nouveau Neisson. Là sur la table, le Profil 105 et juste à côté le Profil 105 bio. N’ayant jamais goûté ce dernier, c’était l’occasion rêvée de s’y frotter et de le comparer au 105 classique. J’ai commencé par le bio et j’ai été conquis dès les premières effluves : du beurre épicé et légèrement poivré pour une impression très pâtissière et gourmande. La bouche suit la même trame et la finale se fait plus boisée tout en gardant la gourmandise débordante. Simple et d’une efficacité redoutable ! Troisième coup de cœur 😊 J’ai ensuite sauté sur le Profil 105 et y ai trouvé des différences marquées, avec un côté beurré en retrait et des agrumes très présents. La bouche est plus vive et le bois y apparait déjà et la finale ne se fait « que » le prolongement de la bouche. C’est bon aussi, sans nul doute (sinon je n’aurais pas une bouteille sur mes étagères) mais j’ai vraiment été conquis par le bio.

Whisky Live 2019 – Neisson 2015
On enchaine ensuite sur deux nouveautés mises en bouteilles pour La Maison du Whisky. Il s’agit de deux fûts de 2015, l’un full proof (dont je vous avais parlé sur ma page Facebook lors de ma dégustation au Golden Promise) et l’autre réduit à 45%. Ce dernier ne m’a pas convaincu, malgré son équilibre et un boisé bourbon qui se développe au fur et à mesure de la dégustation. La version à haut degré, comme je l’avais écrit sur ma note de dégustation sur FB, est plus intéressante mais aussi déstabilisante avec un caractère de rhum encore jeune mais aussi des traits de rhum plus vieux. Pour moi, c’est un rhum plus analytique que plaisir.

Whisky Live 2019 – Neisson 2003 Sacha
Mais il y avait une autre nouveauté chez Neisson lors de ce week-end, un rhum qui a beaucoup fait parler sur le salon et les réseaux sociaux : le Neisson 2003 Sacha. Il n’était pas évident d’y goûter malgré une insaisissable bouteille au VIP. J’ai personnellement eu l’occasion d’y mettre le nez lors de la masterclass Neisson où Alex Bobby et l’artiste Philippe Baudelocque nous ont parlé de cette cuvée. Nous sommes ici sur l’association de spiritueux et d’art.
Le contenu d’abord : nous avons un jus de 2003 – année exceptionnelle quant à la richesse de la canne avec un brix à plus de 24 sur la parcelle dont les cannes utilisées pour l’élaboration de ce rhum sont issues – mis en bouteille à son degré naturel de 46.1%. Il ne restait plus que deux fûts de bourbon, qu’Alex Bobby a décidé de blender dans un fût de cognac de 600L. Je n’ai pas les durées de vieillissement en fûts de bourbon et de cognac cependant, j’ai oublié de demander cette précision.
Dans le verre, c’est avant tout un profil gourmand qui s’en dégage, même si plus sombre que beaucoup de Neisson, puisque des notes torréfiées sont très présentes, en plus de la canne, des épices, du bois et d’une fraicheur fruitée. Des notes de vieux bois patiné, de vanille et de cire complètent son profil. On garde le côté cacao/chocolat en bouche, qui est accompagné des épices et des fruits (dont des agrumes). La texture est d’une certaine manière, elle aussi, torréfiée – même si ça ne veut rien dire – et enrobe bien la bouche. La finale est longue et on garde cette trame torréfiée, qui est pour moi la signature de ce rhum, sans prendre le dessus sur tout le reste néanmoins, puisque le bois et la vanille se font également sentir. Franchement c’est très bon ! Un autre coup de cœur du salon à n’en pas douter (et le troisième chez Neisson – monomaniaque moi ?!).

Whisky Live 2019 – Neisson 2003 Papillon
Le contenant maintenant : les traditionnelles bouteilles Neisson sont habillées de noir et sérigraphiées en blanc argenté. Philippe Baudelocque a représenté différents « animaux stellaires » censés représenter les liens entre les différents ordres naturels, si je ne dis pas de bêtise. C’est vraiment très joli. Chaque bouteille est présentée dans un coffret en bois élaboré en France par un menuisier, coffret qui arbore également un des cinq animaux.

Whisky Live 2019 – Neisson 2003 les animaux
Voilà pour cette cuvée exceptionnelle, mais il reste tout de même un point à évoquer : le prix, 1200€ la bouteille. Cela a été un sujet de conversation durant tout le week-end, beaucoup de monde de comprenant pas ce tarif et jetant la pierre à Neisson, sur fond de « Ils trouvent tous les moyens possibles pour se faire de la thune », « Neisson n’est plus accessible au commun des mortels » et j’en passe. J’ai quelques éléments de réponse sur le sujet, principalement pour avoir posé des questions durant la masterclass.

Whisky Live 2019 – Neisson masterclass
Une cuvée comme celle-ci représente un pourcentage ridicule de la production de rhum chez Neisson, il est compliqué de juger une distillerie sur quelques centaines de bouteilles (comme sur l’Armada). Grégory Vernant et son équipe ont la volonté de créer des rhums qui dureront, en ce sens que ce rhum fait partie du patrimoine martiniquais et de la distillerie et qu’il ne souhaite pas que ce rhum soit vendu et bu en quelques mois. Ensuite, nous avons affaire ici quelque chose qui n’est pas qu’un rhum, puisqu’il est marié à une œuvre d’art, ce qui est un concept bien différent d’une « simple » bouteille de rhum. Et enfin pour ce qui est de l’argent que Neisson va se mettre dans les poches, il faut garder en tête qu’en plus de la valeur d’un rhum qui a vieilli de nombreuses années sous les tropiques, le prix de l’œuvre en elle-même et du coffret sont loin d’être négligeables ; on parle ici de plusieurs centaines d’euros et je crois Grégory quand il dit que ce genre d’embouteillage est loin d’être une manne financière.
Je rejoins en revanche l’avis de certains : il est bien dommage que la plupart des amateurs de rhum (moi compris) ne puissent pas acheter un tel rhum !
Voilà ce qui clôt ce long volet Neisson 😊

Whisky Live 2019 – Bally 2008 et 2000 brut de fût
Il nous reste quelques rhums agricoles à passer en revue cependant.
Retour chez Bally avec un 2008 embouteillé à 43% pour LMDW. Avant tout je dois avouer ne pas être fan de Bally (si ce n’est des vieilleries dégustées ici et là). Ici, le nez nous offre un profil pas franchement Ballysien, avec un rhum vif (entre autres sur le zest d’orange), épicé, légèrement acide et poivré. En bouche le boisé est marqué et les épices toujours présentes et c’est sur la finale que l’on tend à retrouver le profil Bally avec plus de rondeur et moins de vivacité et de fraicheur. Pour résumer, j’ai aimé le nez ^^
Le 2000 brut de fût maintenant, rhum que je n’avais pu déguster jusqu’à ce jour. Ayant apprécié le 1998 et beaucoup moins le 1999, ce 2000 m’intriguait. Au nez il nous apparait intense et complexe sur un profil chaud et torréfié non exempt de fraicheur cependant ce qui permet de créer l’équilibre. Le cacao se fait de plus en plus présent. En bouche, l’alcool se remarque et accompagné d’une légère astringence ; cependant il reste encore plutôt équilibré et se caractérise par une légère sucrosité. La finale est longue mais trop marquée par le bois et cette dominante sombre. Plus qu’honnête que ce millésime, qui pour moi se positionne entre le 1998 et le 1999, même si chronologiquement ça n’a aucun sens.

Whisky Live 2019 – Libération 2019
Un petit événement sur le salon : les nouveaux Libération en dégustation. C’est naturellement sur le stand de Capovilla et de ses eaux-de-vie qu’étaient présentées les traditionnelles deux versions de cette nouvelle mouture. Avant out il faut savoir qu’il s’agit d’un 6 ans, distillé chez Bielle et dont les fûts (exclusivement d’ex vin de Bordeaux) sont encore chez Karukera. En effet, ces Libération 2019 disponibles sur le salon n’étaient que des “échantillons” récemment prélevées du fût pour l’occasion. L’embouteillage final devrait se faire d’ici la fin d’année. Rappelons que les Libération 2017 étaient malheureusement marqués par un boisé bien trop présent.
La version réduite est à 45% et elle se défend pas trop mal. Equilibré, aux arômes beurrés, poivrés et de poudre à canon, ce rhum ne varie pas entre le nez et la bouche. La finale, elle, est un peu mollassonne et pas bien longue. La version integrale (à prononcer avec l’accent italien), qui est à 60%, offre un nez plus gourmand avec toujours cette poudre à canon, mais aussi vanille, orange et une impression pâtissière. Pas mal. En bouche c’est la même idée mais avec un alcool pas super bien intégré et la finale est plus longue que sur la version réduite.
Bon, je n’ai pas été totalement convaincu même si l’expérience n’est pas désagréable. Le point positif c’est que contrairement à 2017, ce n’est pas le bois qui emporte tout. Ce qui m’a un peu ennuyé c’est le manque d’opulence tropicale ; où sont les fruits mûrs ? On a l’impression globale que ces deux rhums font plus jeunes qu’ils ne sont (surtout la version réduite). Si j’en ai l’occasion j’essaierai de déguster les versions finales pour me faire une idée définitive.
Allez, ça suffit pour cette première partie !
Mon Whisky Live 2019 – Partie 2
Mon Whisky Live 2019 – Partie 3
Merci pour cette jolie balade qui m’a littéralement ramené sur ce très bel évènement dand le monde du jus de canne !
Bravo môssieur poussette 👍👍👍
LikeLike
Merci Seb ! Y’avait de bien jolies choses, y’avait Neisson ^^
LikeLike
Pingback: Mon Whisky Live 2019 – partie 2 | Les rhums de l'homme à la poussette
Pingback: Mon Whisky Live 2019 – partie 3 | Les rhums de l'homme à la poussette
Pingback: L’ultime Rhumaton | Les rhums de l'homme à la poussette
Pingback: Mon Whisky Live 2021 – Partie 1 | Les rhums de l'homme à la poussette
Pingback: Rhum Rhum Libération 2020 | Les rhums de l'homme à la poussette
Pingback: Mon Rhum Fest 2023 – partie 2 | Les rhums de l'homme à la poussette