Le Marché de Noël du Rhum Society

Vous voulez savoir quel était le dernier salon rhum de l’année ? Facile, c’était le Marché de Noël du 1802 organisé à l’Hôtel Monte Cristo et il se tenait le week-end dernier. Sur le modèle du Rhum Society mais à échelle plus réduite, cet événement rassemblait plusieurs embouteilleurs indépendants français venus présenter leurs nouveautés. Cinq chambres furent aménagées pour l’occasion et permettaient de partager un moment, en petit comité, avec les exposants. Comme lors du Rhum Society, la possibilité de se frotter à de nouveaux rhums était bien sûr l’attrait principal du salon mais l’organisation rendait possible les échanges privilégiés avec les différents acteurs du rhum venus faire découvrir leurs derniers nés, ce qui était au moins aussi important.

N’étant pas certain de pouvoir m’y rendre, j”avoue avoir attendu le dernier moment pour prendre mon billet, ce qui au final me permis de cibler un créneau horaire qui semblait avoir été un peu boudé et ainsi de profiter d’un affluence (encore) plus réduite 🙂
J’ai eu la chance de pouvoir prendre mon temps et de passer plus de deux heures à déguster nectars et paroles.

Place à la dégustation !

Le Marché de Noël du Rhum Society – Tres Hombres et Les Frères de la Côte (et une barbe)

Très Hombres et Les Frères de la Côte
Plus besoin de présenter les Frères de la Côte, cet embouteilleur indépendant unique en son genre puisque leurs rhums ont tous voyagés dans la calle d’un voilier pour faire la traverser de l’Atlantique. Les fûts ainsi bercés par la houle permettent à leur précieux contenant de vieillir de manière dynamique. Fort de leur succès et de la demande croissante pour ce genre de mode de transport, ils sont en train de réhabiliter un autre voilier, le Zeehaen. Si vous voulez les aider et faire partie de l’aventure, c’est par-ici.

La Palma (Aldea) – 43%
Ce rhum pur jus de canne est vieilli selon la méthode solera et son vieillissement se fait en fût d’Armagnac et de Moscatel.
A noter que les rhums de La Palma voyagent plus longtemps dans la cale étant donné qu’ils sont chargés à l’aller, en route vers les Caraïbes.
Nez : boisé armagnac, fruits secs et impression sèche
Bouche : bien plus douce que prévue et on garde les fruits secs – je n’ai pas senti le pur jus de canne
Finale : fruits secs, vanille et sucrosité persistante
Le nez partait bien mais je l’ai trouvé un peu trop sur la douceur par la suite.

Foursquare 8 ans – 42,2%
9 fûts pour ce Foursquare, avec 3 finishs différents
Nez : coco, miel, vanille, fruits secs
Bouche : dans la droite ligne du nez, légère poudre à canon en prime
Finale : sèche, coco, boisé
Un Foursquare somme toute assez classique – mais réussi – et fidèle à l’image des rhums issus de cette distillerie.

République Dominicaine – 41%
Je passe, ce n’est pas mon truc, entre un nez très discret et un manque de texture.

La Favorite – 56,5%
26 mois en fût de bourbon, 5 mois de fûts d’Armagnac sur le bateau et encore la même durée dans le fût, à Saint-Etienne
Nez : poivré, épicé, expressif, vanille, léger zest d’orange
Bouche : on retrouve les mêmes marqueurs, toujours avec une grosse identité
Finale : poivre, épices et fruits secs
Pas mal pour un si jeune, si on aime les épices et le poivre, on est servi !


Famille Ricci
Avant de parler des deux rhums dégustés, un petit mot sur ce nouvel embouteilleur indépendant français. Leur idée de départ était clairement d’offrir des rhums abordables, tant au niveau gustatif que tarifaire. Ici, pas de single casks ou même d’origine unique, le parti pris est de réaliser des assemblages et d’élever les rhums en fût, une fois rapatriés dans le sud de la France ; un double travail donc, en plus de la sélection initiale. Ce qui ne gâte rien : ils ont la volonté de proposer des blends originaux, histoire de se démarquer des acteurs déjà existants. Il semblerait que cette démarche soit couronnée de succès, alors des félicitations s’imposent 🙂 Mais au programme de la journée, “juste” deux rhums proposés sur ce marché de Noël, vraisemblablement ceux les plus à mon goût, donc je ne vais pas m’en plaindre !

Influences 2 – 46%

Le Marché de Noël du Rhum Society – Famille Ricci Influences 2

Il s’agit d’un rhum de 6 ans, assemblage australien à 60% et jamaïcain à 40%. Les deux liquides ont passé quelques mois en fût de Pineau des Charentes blanc, avant de séjourner un certain temps dans des petits fûts d’acacia pour le Worthy Park et dans des fûts de chêne neufs (de la tonnellerie Navarre) pour le Beenleigh. L’assemblage est réalisé au dernier moment en cuve inox et bénéficie d’une réduction au goutte à goutte sur 8 semaines et d’un brassage régulier.
Nez : original et gourmand, avec le jamaïcain qui est un peu en avant mais sans prendre vraiment le dessus. Niveau arômes, il propose de la noix fraîche, des agrumes, un côté légèrement bourbon et une timide pèche
Bouche : vraie association des deux origines, ce qui créé une vraie complexité ; j’ai trouvé que l’alcool ressortait un peu, sans que ce soit vraiment gênant
Finale : on retombe sur les deux origines et on reste dans cette originalité/complexité due à l’élevage dans différentes fûts, le boisé étant d’ailleurs plus marqué sur cette étape de la dégustation

Le Marché de Noël du Rhum Society – Famille Riccis Volt Face

Volt Face – 65,3%
Comme je vous disais, Famille Ricci veut créer des rhums faciles d’accès, mais nous avons ici un contre-exemple avec un rhum a haut degré (d’où son nom).
Assemblage à 50/50 de rhum du Guyana (distillé sur le Coffey still) et de Jamaïque (Worthy Park à nouveau), c’est un 8 ans. Cette fois-ci le vieillissement en France se fera alternativement en ex-fût de Pineau, puis en fût de châtaignier neuf (de 220L).
Nez : l’alcool a l’air bien fondu et ce Volt Face parait même “doux”, avec des fruits à coque (surtout l’amande), une facette torréfiée et le duo pomme/poire que je retrouve souvent chez Worthy Park
Bouche : elle confirme que l’alcool est bien dosé, et l’attaque est légèrement sucrée (le fût de Pineau). On garde une très présente note de torréfaction, mais l’olive pointe le bout de son noyau. Surprenant
Finale : longue, elle est dominée par des notes chaudes, empyreumatiques, torréfiées et boisées

Je suis bien content d’avoir enfin mis mettre le nez dans les rhums de la Famille Ricci. Ici, deux créations sympa et réussies, avec des assemblages intéressants, bref un premier contact prometteur 🙂


Maison Ferroni
On reste dans le Sud, avec une maison dont je vous ai régulièrement parlé et dont les créations originales méritent le détour.

Le Marché de Noël du Rhum Society – Maison Ferroni Bruts de Fût, Australie 2013 et Belize 2007

Australie 2013 – 60,4%
Ce Beenleigh bénéficie d’un double vieillissement, d’abord en fût de Bourbon pendant 4 ans, puis en fût de Beaumes de Venise pour trois ans supplémentaires, ce dernier ayant été récupéré le jour de la vidange, ses douelles étaient encore gorgées de vin, ce qui a eu une influence notable sur le rhum.
Nez : rancio, vanille, bois ; des arômes rassurants et gourmands
Bouche : on retrouve les mêmes notes avec une certaine sucrosité du Beaumes de Venise.
Un rhum étonnamment facile pour son degré et donc très dangereux !

Bélize 2007 – 58,8%
Ce rhum de 13 ans provenant de la distillerie Travellers a passé le plus clair de son temps en fût de Bourbon, pour ensuite être transvasé dans de petits fûts de Cognac de 56 litres. C’est ce double vieillissement et surtout ce passage de plusieurs années en petits fûts, qui vont lui donner des notes bien particulières.
Nez : boisé, coco (oui on est bien à Bélize), torréfié
Bouche : bien boisée, bien plus que les Bélize auxquels on a pu être habitué. Tannique, il n’en demeure pas moins gourmand et rond
Finale : tannique et torréfiée
Un Bélize qui nous sort un peu de nos repères et qui apporte une vraie autre dimension.

Le Marché de Noël du Rhum Society – Ferroni Les Spiritueux Déglingués

Les Spiritueux Deglingués
Lors du premier confinement, Guillaume Ferroni et son équipe nous avait pondu un Gin Edition Confinement (très réussi d’ailleurs), cette fois-ci ils poussent le bouchon un peu loin (Maurice), avec la création de huit alcools improbables et singuliers. Une vodka au pin d’Alep, un negroni distillé, un vin cuit et j’en passe… Parmi ces expériences loufoques (mais menées tout à fait sérieusement) les “Fûts Pirates” ; un assemblage du Gwada 1998 et d’une multitude d’échantillons de rhums en tous genres. Des samples reçus pour sélectionner des fûts, des tests de blends… Bref, une recette qu’il sera totalement impossible de reproduire. Mais ce n’est pas tout, puisque le résultat de ce blend a été divisé en quatre micro barriques, qui ont été planquées au sommet des massifs du coin pour poursuivre leur maturation. Seules 80 bouteilles résulteront de cette folle expérience, alors si vous avez l’occasion de mettre la main sur l’une d’entre elles, n’hésitez pas 🙂

Le Marché de Noël du Rhum Society – Rhum JM pour Old Brothers et Excellence Rhum et Rhum JM pour le Bar 1802

Dans la chambre suivante étaient rassemblés quatre rhums de deux distilleries : JM de Martinique et Chairman’s Reserve de Sainte Lucie.
Deux embouteillages pour le Bar 1802 et deux autres pour l’association entre Old Brothers et Excellence Rhum.
Je ne vais pas m’attarder sur le plus vieux JM jamais embouteillé, un 21 ans à 43%, car il mérite plus d’attention que quelques minutes lors d’un salon, Cris du 1802 m’a gentiment fait un sample afin que je puisse m’y replonger plus longuement et tranquillement à la maison ; je vous en reparlerai donc prochainement.

Rhum Vieux JM pour le 1802 – 58%
Nez : un alcool bien dosé pour des arômes de noix, de bois et de terre (juste un peu)
Bouche : puissante, sa nature de rhum agricole se fait ici plus évidente et est accompagnée d’une attirante sucrosité sur l’attaque
Finale : elle s’épanouit sur la vanille et les épices
Moins épicée que la version pour Christian de Montaguère, elle est tout aussi facile et gourmande, malgré son jeune âge et ses degrés.

Le Marché de Noël du Rhum Society – Chairman’s Reserve pour le Bar 1802 et Chairman’s Reserve pour Old Brothers et Excellence Rhum

Chairman’s Reserve pour le 1802 – 59%
Il s’agit d’un 8 ans provenant des alambic John Dore 1 et Vendôme (je vous rappelle que Santa Lucia Distillers dispose de quatre appareils distillatoires, puisqu’un second John Dore et une colonne Coffey complètent leur flotte d’alambics).
Nez : olive, facette empyreumatique, vanille et un quelque chose de grand arôme, voilà ce qui caractérise ce nez
Bouche : alcool mesuré, ce rhum est vraiment intense et heavy, non sans dégager une certaine gourmandise
Finale : on y retrouve le nez et elle est vraiment longue
J’avoue ne pas être fan de ce style mais je sais être une exception en ce domaine, aussi ce rhum comblera-t-il bon nombre d’amateurs.

Chairman’s Reserve pour Old Brothers et Excellence Rhum – 64%
On monte en gamme puisque ce rhum a 20 ans (il provient uniquement de l’alambic John Dore 1).
Nez : riche ! Très fruité, autant avec des fruits cuits que des fruits exotiques, léger pâtissier, cacao, empyreumatique, discrète olive, fruits à coque… Très évolutif il n’a de cesse de présenter de nouveaux arômes. Un superbe nez !
Bouche : puissante et une goutte suffit pour avoir une explosion et une intensité aromatique impressionnantes. Moins complexe que le nez et un peu moins gourmand mais très concentré
Finale : très longue, toujours sur une sacrée intensité, on retombe sur un côté brûlé et grand arôme.
Quelle intensité et quel nez ! Une sacrée expérience et une belle sélection.

Le Marché de Noël du Rhum Society – Rhums arrangés de Ced pour Christian de Montaguère, Graal mangue et bois d’Inde

Plus qu’une chambre à explorer, avec pas mal de choses à se mettre sous le palais : embouteillages Christian de Montaguère, créations du 1802 et un ovni de chez Compagnie des Indes.
Trois rhums arrangés, avec les deux Ti’Ced pour la boutique de l’Art de Vivre aux Caraïbes et le dernier du bar 1802. Je vous ai déjà parlé des deux rhums de Ced sur ma page Facebook, des arrangés mangue et bois d’Inde dans la série Graal (il se peut d’ailleurs que je sois reparti avec la variété bois d’Inde citronnelle sous le bars :)).

Arrangé 1802
Un rhum de la Réunion de chez Isautier sert de base pour cette création et y sont ajoutés des baies de canneberge séchées, de l’hibiscus et deux poivres (Sichuan et Timut si ma mémoire est bonne).
Le sucre est bien dosé, on a un petit kick du poivre de Sichuan et des notes fruits rouges et hibiscus. C’est réussi.

Le Marché de Noël du Rhum Society – Les cocktails en bouteille par le 1802

Cocktails en bouteille du 1802
On s’approchait de la fin de la journée, alors je vais être un peu moins détaillé sur ces retours ^^
Trois cocktails “pre-made” étaient présentés et disponibles à l’achat. Pour commencer un Poire et Absinthe, très sur la fraîcheur et l’acidité où j’ai découvert l’association de ces deux éléments et ça fonctionne bien. Un Old Fashioned au rhum pour continuer, un grand classique du monde des cocktails, que j’ai trouvé également assez classique dans son interprétation. Et enfin un Negroni, où est le gin est remplacé par… du rhum bien sûr. C’est celui qui m’a le plus convaincu, il est superbement bien dosé, entre amertume, cacao et sucre, il se boit avec une facilité déconcertante. Le format étant de 25cl, ce qui est bien trop peu, j’ai demandé s’ils comptaient réaliser une version perfusion, j’attends la réponse.

Le Marché de Noël du Rhum Society – Compagnie des Indes Boulet de Canon 9 et Rhum Arrangé du 1802

Compagnie des Indes Boulet de canon 9
Tous les ans, Florent Beuchet nous gratifie d’un rhum aux accents fumés et à la personnalité affirmée. Une année sur deux cette identité atypique provient d’un vieillissement en fût de whisky tourbé et les autres années, il laisse libre court à son imagination et à son inventivité pour apporter ces notes fumées singulières. Ce coup-ci, il a utilisé une technique du monde du cocktail, le fat wash, qui consiste à faire infuser un corps gras dans l’alcool, puis d’amener la mixture à une température négative afin que la graisse fige pour être retirée. Après filtrage, il reste donc, ici, un rhum infusé et donc parfumé. En l’occurrence il a un puissant goût de… barbecue mais pas n’importe quel barbecue, puisqu’a été récupérée la graisse de viande du restaurant Melt, spécialiste du BBQ à l’américaine et donc fumé. A vrai dire je pensais tomber sur un profil similaire à d’autres Boulets de Canon, ou peut-être au Bushfire de chez Mhoba mais pas du tout. On a vraiment ce côté graisse de viande fumée, à tel point que – probable vue de l’esprit – on a l’impression d’avoir cette texture en bouche. J’ai vraiment apprécié l’expérience !


Quelle réussite que ce Marché de Noël à l’Hôtel Monte Cristo et quel plaisir de faire autant de découvertes rhums, aussi diverses et variées. Quand je pense que j’avais hésité de m’y rendre !

3 thoughts on “Le Marché de Noël du Rhum Society

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